L’année ciné 2020 par celles et ceux qui l’ont faite

Comme tous les ans, nous avons demandé aux cinéastes que nous avons interviewés ces 12 derniers mois de nous parler de leur(s) film(s) préféré(s) de l’année. Il ne vous aura pas échappé que cette 2020 a été particulièrement singulière, or à notre grande et bonne surprise, une cinquantaine de cinéastes (encore plus que les années précédentes !) ont tenu à nous répondre. Certain.e.s nous parlent de l’importance de l’expérience en salles, beaucoup font preuve de curiosité en cherchant la créativité partout où elle se trouve : longs, courts, animation, doc, expérimental et même jeux vidéos. En 2018, Touch Me Not d’Adina Pintilie, High Life de Claire Denis et Zama de Lucrecia Martel étaient arrivés en tête. En 2019, c’était Parasite de Bong Joon-Ho et Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma. Cette année, c’est encore une réalisatrice qui se distingue, soit 5 fois en 6 films plébiscités. Vous avez pu voir certains de ces films en salles ou en festivals, d’autres seront visibles en 2021. Gardez l’œil bien ouvert sur ces nombreux conseils…

Rose Glass (entretien prochainement en ligne)
Comme tout le monde, je n’ai pas vu autant de films que j’aurais souhaité cette année, mais je citerais L’Adieu de Lulu Wang, qui est d’ailleurs le tout dernier film que j’ai vu sur grand écran avant le confinement.
• Grand Prix à Gérardmer, 17 fois nommé aux British Independent Film Awards, Saint Maud est le premier long métrage de la Britannique Rose Glass. Celui-ci sortira en France en 2021 et figure parmi nos révélations de l’année.

Natalie Erika James
Mes films préférés récents par des cinéastes débutants sont certainement Little Zombies de Makoto Nagahisa et Saint Maud de Rose Glass. Je sens que l’œuvre et le cerveau de Charlie Kaufman auront toujours une place spéciale dans mon cœur, donc je vais également citer Je veux juste en finir.
• Dévoilé à Sundance, Relic est le premier long métrage de l’Australo-Japonaise Natalie Erika James. Il est sorti cet automne dans les salles françaises.

Uisenma Borchu
Mignonnes de Maimouna Doucouré. Selon moi, ce film dépeint ce que nous risquons de faire à nos enfants, et ce que nous leur avons déjà fait. J’ai lu que la réalisatrice avait été accusée de pédophilie, ce qui est proprement ridicule. A celles et ceux qui sont trop mal à l’aise pour regarder les scènes où les fillettes dansent, je conseillerais au contraire de ne surtout pas détourner les yeux, parce que cela montre là où nous en sommes aujourd’hui (la situation est peut-être même pire que ce que l’on imagine). J’apprécie le travail de Doucouré en tant que réalisatrice et en tant qu’être humain, et la manière dont elle nous pousse à faire face à ce tabou : comment nos enfants grandissent.
• Allemande d’origine mongole, Uisenma Borchu signe avec Black Milk son second long métrage après le déjà remarquable Don’t Look At Me That Way. Ce film a été dévoilé à la Berlinale.

Anton Sazonov
Je veux juste en finir est pour moi le film de l’année. Charlie Kaufman est parvenu à y articuler tout ce que je pense et ressens sur le temps qui passe, le tout dans un forme simple et pourtant audacieuse et subtile. Dans mon esprit, ce film est désormais indissociable de la pandémie. D’une part parce que cette dernière m’a contraint à la regarder depuis chez moi, mais aussi parce qu’il s’agit d’un film sur l’auto-isolement infini de tout un chacun. Si je peux citer un deuxième film, j’irai dans la direction opposée en citant The Truffle Hunters de Michael Dweck and Gregory Kershaw. Ce documentaire était comme un phare dans la nuit de la pandémie.
• Primé au Festival de Locarno, le court métrage Leave of Absence du Russe Anton Sazonov a, entre autres, été sélectionné à Sundance cette année.

Merawi Gerima
J’ai vraiment apprécié Time de Garrett Bradley. Quelle histoire incroyable, documentée depuis des décennies par son héroïne Sybil Fox Richardson, puis par Garrett Bradley qui a pris le relais au moment critique. L’interaction entre ces deux femmes dans la narration de cette histoire donne lieu à une réalisation intergénérationnelle vers laquelle tous les cinéastes devraient tendre, pour le bien de notre métier et des histoires.
• Dévoilé à la Mostra de Venise, Residue est le premier long métrage de l’Américain Merawi Gerima. Ila fait sa première française dans le cadre du programme Le Cinéma comme il va au Centre Pompidou. Ce film sortira en salles en 2021.

Li Dongmei
Residue de Merawi Gerima. C’est un film où j’ai eu l’impression de percevoir le cœur sincère du créateur, à travers les images-mêmes. La narration, les émotions et la manière dont celles-ci sont exprimées y sont extrêmement naturelles et sincères. En parallèle, le metteur en scène utilise une sorte de poésie pour créer une romance cruelle, qui défie la logique, mais aussi pour libérer le spectateur d’un stricte travail de la raison.
• Dévoilé à la Mostra de Venise, Mama est le premier long métrage de la Chinoise Li Dongmei. Prix du meilleur film au Festival Pingyao créé par Jia Zhang-Ke, Mama a notamment été sélectionné à Busan.

Stéphane Riethauser
Petite fille de Sébastien Lifschitz, un film sublime et bouleversant sur la transidentité, la résilience et l’amour de la famille, un film important, découvert à la Berlinale avant le confinement. Et Futur Drei (No Hard Feelings) de Faraz Shariat, également découvert à la Berlinale, un petit bijou de cinéma avec des comédiens époustouflants de justesse, magnifiquement servi par un montage dynamique, un film qui déconstruit les stéréotypes en tout genre avec une grande sensibilité, produit avec très peu de moyens par un collectif de jeunes. Le cinéma allemand est bien vivant!
• Sélectionné entre autres à Locarno, Visions du Réel et Chéries-Chéris, Madame du Suisse Stéphane Riethauser est sorti en salles cet été. Il est désormais visible sur le site vod d’Outplay.

Lee Woo-Jung
C’était Moving On de Yoon Dan-Bi. J’ai retrouvé ce qu’une projection en salle et voir un film dans ces conditions pouvaient avoir de précieux. Je l’ai regardé avec mon masque sur le nez, et j’ai pleuré jusqu’à ce que mes lunettes soient complètement embuées.
• Prix du meilleur film coréen indépendant à Busan, Snowball est le premier long métrage de la Coréenne Lee Woo-Jung. Celle-ci figure dans notre dossier consacré aux révélations 2020 du cinéma coréen.

Travis Wood
Mon long métrage préféré de cette année est Save Yourselves ! de Alex Huston Fischer et Eleanor Wilson. J’ai trouvé l’intrigue géniale et les personnages très crédibles. Parmi tous les films que j’ai vus chez moi pendant la pandémie, c’est le seul qui m’ait donné l’impression d’être au cinéma.
• L’Américain Travis Wood s’est distingué cette année avec son court Affurmative Action, sélectionné au Festival SXSW d’Austin. Vous pouvez visionner ce film sur Le Polyester.

Anthony Chen
Je choisirais Nomadland de Chloé Zhao.
• Caméra d’or pour Ilo Ilo, le Singapourien Anthony Chen a signé son second long métrage, Wet Season, qui est sorti en salles cette année. Il est désormais visible en vod.

Sharipa Urazbayeva
Mon film préféré de l’année est Nomadland de Chloé Zhao. Voilà un film fort, signé d’une femme, et qui renvoie une image de femmes fortes. Frances McDormand est mon actrice préférée, si je le pouvais je l’engagerais pour tourner au Kazakhstan.
Mariam est le premier long métrage de la Kazakhe Sharipa Urazbayeva. Dévoilé à Locarno, sélectionné à Toronto et Busan, ce film a fait sa première française cette année au Festival des Cinémas d’Asie de Vesoul où il a remporté le Cyclo d’or du meilleur film.

Heidi Ewing
Je pense que Nomadland de Chloe Zhao est un film très spécial. L’attention aux détails, la part d’improvisation dans la performance de Frances McDormand, l’utilisation de « vraies » personnes qui ne sont pas des acteurs m’ont rappelé le processus créatif de I Carry You With Me. J’apprécie l’émotion crue de ce beau film.
• Nommée aux Oscars pour Jesus Camp, l’Américaine Heidi Ewing signe sa première fiction avec I Carry You With Me. Doublement primé à Sundance, ce film a fait sa première française cet automne au Festival de La Roche-sur-Yon.

David Oreilly
En ce qui me concerne, cette année a été presque entièrement dédiée aux programmes télés, même si bien sûr, la vie réelle est restée la source de divertissement la plus incroyable qui soit. Pour être honnête, même si les émissions de télé représentent la majeure partie de ce que j’ai consommé, je les trouve humainement bonnes pour la poubelle. La seule œuvre qui m’a vraiment ému cette année a été Death Stranding – un jeu pour PS4. Il n’a pas trouvé écho dans le milieu du cinéma alors qu’il avait tout pour, mais malgré cela, c’est à mon humble avis une œuvre d’art monumentale.
• Le réalisateur et créateur numérique irlandais David OReilly a signé pendant le confinement le court métrage Corona Voicemails : Staying Home. Projeté en première française au Festival de La Roche-sur-Yon, Corona Voicemails : Staying Home est visible sur Le Polyester.

Nara Normande
Never Rarely Sometimes Always de Eliza Hittman. J’aime la manière dont Eliza fait le portrait d’une adolescente qui voyage à New York pour un avortement, c’est un film simple avec beaucoup de subtilité. Hélène Louvart pour la photographie avec sa spécialité 16mm c’était un très bon choix ! Autre film que j’ai vu pendant le festival c’était Eyimofe (This is my Desire) de Arie Esiri et Chuko Esiri, de Nigeria et États Unis. Ce film était plein de fraîcheur, très puissant et très bien réalisé, je le recommande fortement !
• La réalisatrice d’origine brésilienne Nara Normande signe avec Guaxuma un court métrage qui a fait le tour des festivals du monde entier, d’Annecy à Toronto en passant par SXSW et Clermont-Ferrand. Ce film est à découvrir sur Le Polyester.

Santiago Menghini
Never Rarely Sometimes Always de Eliza Hittman.
• La Canadien Santiago Menghini a signé le court métrage Regret, qui a été sélectionné à Sundance avant d’être primé au Festival SXSW d’Austin.

Ash Mayfair
Le film qui m’a le plus inspirée cette année, à la fois en tant qu’artiste et activiste, était un documentaire intitulé Things We Dare Not Do de Bruno Santamaria Razo. J’ai été jurée pour l’IFF de Chicago et nous lui avons donné le Q-Hugo d’or. Il s’agit d’un documentaire d’observation sur une jeune adolescente transgenre dans un petit village, essayant de dire à ses parents qu’elle souhaite vivre et s’habiller comme une femme. L’exécution ne ressemblait à aucun documentaire que j’avais vu auparavant. Le film était si intime qu’il défie les notions de genre de façon particulièrement évocatrice. Cela m’a donné envie de prendre mon appareil photo et de partir à la découverte du monde immense des histoires et de l’humanité qui nous entoure.
• Sélectionné à Toronto, Busan et San Sebastian, La Troisième femme est sorti cet été en salles. Il est désormais visible en vod.

Juan Mónaco Cagni
Je dirais Les Enfants d’Isadora de Damien Manivel.
• Le tout jeune réalisateur argentin Juan Mónaco Cagni a signé Ofrenda à 21 ans. Ce long métrage, couronné par l’Abrazo du meilleur film au Festival Biarritz Amérique Latine, figure dans notre dossier des meilleurs inédits de l’année.

Mirabelle Fréville
Mes deux coups de cœur : Eva en août de Jonás Trueba et Adolescentes de Sébastien Lifshitz. Et deux surprises : Josep de Aurel (jamais facile pour un dessinateur de passer du crayon à la caméra) et Dark Waters de Todd Haynes (surtout quand on sait que c’est un film de commande).
• La Française Mirabelle Fréville s’est distinguée cette année avec son court métrage La Bobine 11004, dévoilé au Festival Visions du Réel.

Kazuhiro Soda
Le Jeune Ahmed de Jean-Pierre et Luc Dardenne m’a laissé une profonde impression. Je n’ai jamais vu de film ennuyeux de leur part!
• Dévoilé à la Berlinale, Professeur Yamamoto du Japonais Kazuhiro Soda a remporté la Montgolfière d’or au Festival des 3 Continents à Nantes. Ce documentaire sortira en France en 2021.

Chintis Lundgren
Je n’ai fait quasiment aucun festival de cinéma cette année, mais ma moitié, Draško Ivezić, aime passer nos matinées à me montrer toutes sortes de programmes pour enfants avant que l’on retombe dans un coma profond. On peut dire que c’est une sorte de festival aussi. Un festival avec seulement deux invités, mais qui dure toute l’année. L’unique festival d’animation où je me suis rendue fut Animafest Zagreb. Difficile de choisir un favori à partir de la sélection d’un seul festival mais, étant moi-même réalisatrice d’animation, j’aimerais mettre en lumière au moins un court métrage d’animation: How to Disappear – Deserting Battlefield de Michael Stumpf, Leonhard Müllner et Robin Klengel J’ai choisi celui-ci parce qu’il est resté avec moi bien plus longtemps que la simple durée du programme court où je l’ai vu, parce qu’il suscite la réflexion et qu’il se distingue nettement dans un océan de productions qui se ressemblent toutes. Coté long métrage, je citerais la satire brutale de Save Yourselves! d’Alex Huston Fischer et Eleanor Wilson. C’est si facile de s’identifier aux personnages que c’en est troublant, leur réalisme rend ce survival drôle et rafraichissant. J’apprécie également qu’il n’y ait pas vraiment de fin, qu’il s’agisse surtout de profiter du voyage.
• Le court d’animation Toomas Beneath the Valley of the Wild Wolves, réalisé par l’Estonienne Chintis Lundgren, a circulé un peu partout en festivals, notamment à l’Etrange Festival à la rentrée. Ce film est visible en ligne.

Bridget Moloney
Je crois que c’était Invisible Man de Leigh Whannell : terrifiant, tordu, très tendu et parfois très drôle.
• Le court métrage Blocks de l’Américaine Bridget Moloney a été sélectionné entre autres à Sundance et au Festival SXSW d’Austin cette année.

Ivan Ostrochovský
Une grande fille de Kantemir Balagov. J’ai été fasciné par la façon dont il a réussi à projeter ses personnages dans des directions inattendues et à prendre de court les attentes du public, tout en dépeignant la dévastation morale de gens qui vivent les terreurs de la guerre. J’ai également été séduit par la stylisation des couleurs, ce qui ne prend jamais le pas sur le reste. C’est une réussite incomparable.
• Dévoilé à la Berlinale, Les Séminaristes du Slovaque Ivan Ostrochovský sortira en salles en 2021.

Sandra Wollner
Le nombre de films que je ne suis pas parvenue à voir cette année est déprimant. Ça me semble donc très mal de classer mes films préférés. Je vous les présente donc dans un ordre alphabétique qui ne signifie rien de spécial: Cold Meridian de Peter Strickland, DAU Degeneration de Ilya Khrzhanovskiy & Ilya Permyakov, Days de Tsai Ming Liang, Family Romance LLC de Werner Herzog, Mank de David Fincher, Martin Eden de Pietro Marcello, The Metamorphosis of Birds de Catarina Vasconcelos, Moving On de Yoon Dan-Bi, Running on Empty de Lisa Weber, Shirley de Josephine Decker, Space Dogs de Elsa Kremser et Levin Peter, Les Travaux et les jours de Anders Edström et C.W. Winter (dont je n’ai pas encore vu la seconde partie) et Une grande fille de Kantemir Balagov, qui est mon film préféré de l’année.
• Primé à la Berlinale, The Trouble With Being Born de l’Autrichienne Sandra Wollner a fait sa première française à L’Etrange Festival. Ce film figure dans notre dossier des meilleurs inédits de l’année.

Ann Oren
J’ai pris beaucoup de plaisir à voir The Trouble With Being Born de Sandra Wollner et La Véronica de Leonardo Medel.
• L’Israélienne Ann Oren s’est distinguée cette année avec le court métrage Passage, qui a fait sa première française au Festival de La Roche-sur-Yon.

Adilkhan Yerzhanov
Est-ce possible de citer The Irishman de Martin Scorsese? Si oui, c’est mon préféré. J’ai adoré ce sentiment de culpabilité qu’explore le film. J’ai aussi adoré la série Chernobyl. Quel suspens!
A Dark-Dark Man du Kazakh Adhilkhan Yerzhanov est sorti cet automne en France. Ses deux nouveaux films, Yellow Cat et Ulbolsyn, commencent à circuler en festivals.

Antoine Bonnet et Mathilde Loubes
Mathilde : Personnellement, je n’ai pu voir que peu de films cette année mais sans hésiter mon favori est Pinocchio de Matteo Garrone. J’aimais déjà beaucoup le travail de ce réalisateur et j’ai adoré sa version du conte que j’ai eu l’impression de redécouvrir sous un angle complètement nouveau. J’ai trouvé l’univers sensible et rafraîchissant, l’écriture du film intelligente et drôle, et le jeu des acteurs extrêmement juste. L’utilisation des effets spéciaux, à laquelle je suis assez sensible venant du monde de l’animation, était aussi très agréable. Selon moi, un film qui donne envie de voir des films, et de faire des films !
Antoine : Pour ma part, j’ai été bouleversé par Antebellum de Gerard Bush et Christopher Renz, que j’ai eu la chance de voir en salles. La première chose qui m’a surpris au visionnage et que j’ai adorée, c’est le thème principal composé par Nate Wonder et Roman Gianarthur. Dès l’ouverture du film, cette musique puissante et frissonnante impose l’attention du spectateur et annonce le ton de l’histoire. J’ai vraiment apprécié cette nouvelle vision des réalisateurs sur un thème ancré et qui fait malheureusement toujours écho avec l’actualité.
• Les Français Antoine Bonnet et Mathilde Loubes se sont distingués cette année avec leur court animé Un diable dans la poche, dévoilé à la Berlinale.

Josza Anjembe
Le Colocataire de Marco Berger et Tout simplement noir de John Wax et Jean-Pascal Zadi
• La Française Josza Anjembe a signé le court métrage Baltringue, qui figure dans la présélection pour les César 2021. Ce film est à découvrir sur Le Polyester.

Gints Zilbalodis
Parmi les films qui m’ont beaucoup plu, je citerais Shithouse de Cooper Raiff.
• Le Letton Gints Zilbalodis a réalisé le film d’animation Ailleurs entièrement seul. Primé à Annecy, ce film est sorti en salles à la rentrée et est désormais visible en vod.

Pushpendra Singh
Je trouve toujours très difficile de répondre à de telles questions car cela compartimente le cinéma dans des listes où de nombreux films peuvent être mis à l’écart. Je cite les films que m’ont laissé la plus forte impression, sans ordre particulier : This Is Not a Burial, It’s a Resurrection de Lemohang Jeremiah Mosese, Atlantis de Valentyn Vasyanovych, Desterro de Maria Clara Escobar, Lua Vermella (Red Moon Tide) de Lois Patino et Le Diable n’existe pas de Mohammad Rasoulof.
• L’Indien Pushpendra Singh a réalisé The Shepherdess and the Seven Songs, qui a été dévoilé en début d’année à la Berlinale. Plus récemment, le film a été montré au Festival New Directors/New Films.

Maria Clara Escobar
Pas facile de ne retenir qu’un seul film parmi tous ceux vus en une année, mais le film qui m’a certainement le plus bouleversée fut ce documentaire/film fantastique sud-coréen appelé The Pregnant Tree And The Goblin réalisé par Dong-Ryung Kim et Geyong-Tae Par, et que j’ai vu à l’IFFR de Rotterdam. Le film se déroule dans une sorte de ville fantôme en Corée du Sud, autrefois occupée par l’armée nord-américaine et devenue aujourd’hui un lieu fantasmagorique. La façon dont les réalisateurs mènent le film et promeuvent un nouvel état de réalité est très puissante. Qui pourrait dire que les mythes ne sont pas aussi réels que ceux que nous construisons dans la « vraie » vie? C’est brillant et très courageux d’avoir réalisé un film qui appartienne à la fois au documentaire et au cinéma de genre.
Desterro de la Brésilienne Maria Clara Escobar a été dévoilé en compétition à Rotterdam. Ce film figure dans notre dossier des meilleurs inédits de l’année.

Chelsea Stardust
Mon film préféré montré en festival cette année doit être 12 Hour Shift de Brea Grant. C’est ma nouvelle comédie noire préférée. Angela Bettis crève l’écran comme d’habitude et Chloe Farnworth vole presque toutes les scènes où elle se trouve. Cela ma rappelé les premiers films des frères Coen : incroyablement créatif, intelligent et savamment conçu. J’ai hâte de voir ce que Brea réalisera ensuite! En ce qui concerne les films de studio, mon préféré fut Freaky de Chris Landon. Chris n’est pas seulement l’un de mes cinéastes d’horreur préférés, c’est aussi un mentor et un ami. Le scénario (écrit par Chris et Michael Kennedy) équilibre peur, comédie et sentiments, une combinaison que Chris maîtrise. Vince Vaughn et Kathryn Newton s’emparent sans problème du thème de l’échange de corps et je dois également mentionner les brillantes performances de Celeste O’Connor et Misha Oshertovich. Je pense que nous avons tous envie d’un cinéma de pur plaisir, qui nous offre l’évasion que nous recherchons tous, ce film fait exactement cela.
Satanic Panic de l’Américaine Chelsea Stardust a été présenté à Gérardmer avant sa sortie en dvd. Ce film est également disponible en vod.

Thessa Meijer
Je dirais Filipiñana, un merveilleux court métrage de Rafael Manuel.
• La Néerlandaise Thessa Meijer s’est distinguée cette année avec le court Hitte, sélectionné dans de nombreux festivals dont L’Etrange Festival.

Jack Henry Robbins
Portrait de la jeune fille en feu de Céline Sciamma.
• L’Américain Jack Henry Robbins a signé la comédie VHYes. Sélectionné notamment à Rotterdam, VHYes figure dans notre dossier des meilleurs inédits de l’année.

Florent Gouëlou
Je me souviens m’être précipité au cinéma à l’annonce du deuxième confinement pour faire le plein d’images. Pour moi c’est un gros manque, de ne pas pouvoir aller en salle, c’est un rendez-vous qui me lave les yeux et la tête, c’est vital ! Cette année où les sorties ont été pas mal accidentées, j’ai été émerveillé par la ressortie de Showgirls de Verhoeven, je ne l’avais jamais vu! Cette satire du monde des revues de Vegas, avec ces couleurs intenses, ces scènes de danse électriques, il y a une maîtrise de comment filmer les corps, l’énergie, c’est d’une sensualité dingue sans être jamais vulgaire ; dans le débat de savoir si c’est un grand film ou un nanar, pour moi c’est évidemment un grand film! Et entre deux confinements, j’ai été très touché par Adieu les cons de Dupontel. C’est du beau cinéma français, avec à la fois une esthétique hyper léchée et une interprétation au cordeau. Jackie Berroyer jouant un patient Alzheimer qui retrouve sa maison et sa femme en comparant ce qu’il voit avec ses photos en cadres m’a tiré le sourire et les larmes.
• Le Français Florent Gouëlou a signé le court Beauty Boys, primé au Champs-Elysées Film Festival. Lauréat du Prix à la Création de la Fondation Gan, il prépare le tournage de son premier long métrage, Trois nuits par semaine.

Nuria Gimenez
Le titre qui me vient le plus à l’esprit est Acciddental Luxuriance of The Translucent Watery Rebus de Dalibor Baric. J’ai trouvé cela absolument fascinant.
• L’Espagnole Nuria Gimenez a signé My Mexican Bretzel, qui a été primé notamment à Rotterdam et Mannheim-Heidelberg. Ce film figure dans notre dossier des meilleurs inédits de l’année.

Zhannat Alshanova
The Painter and the Thief de Benjamin Ree! Je l’ai vu à Sundance en présence de l’équipe. J’ai ri, j’ai pleuré, je n’avais aucune idée de la direction qu’allait prendre ce documentaire et j’en ai apprécié chaque instant! Regarder un grand film vous rappelle pourquoi vous avez décidé d’être cinéaste. Je pense que c’est un film important parce qu’il parle beaucoup de la moralité et de la vulnérabilité de l’artiste. J’ai adoré le film, mais j’ai aussi adoré l’expérience de le voir au cinéma, avec l’énergie du public, avec les applaudissements sans fin à l’équipe, avec l’appel vidéo très touchant à l’un des protagonistes qui n’a pas été en mesure de voyager, avec les tremblements sur scène, avec les questions-réponses d’après la séance, avec les discussions en continu à l’extérieur du cinéma, quand tout le monde est gelé mais que personne ne veut pas partir.
• La Kazakhe Zhannat Alshanova a été primée à Locarno pour son court métrage History of Civilization. Ce film a fait sa première française aux Arcs Film Festival et figure dans la prochaine compétition internationale du Festival de Clermont-Ferrand.

Sophie Littman (entretien bientôt en ligne)
J’ai deux films préférés qui, coïncidence, sont tous les deux géorgiens! J’ai adoré Et puis nous danserons de Levan Akin, une mélodie pleine de joie et de mouvement. J’ai aussi eu la chance de voir Au commencement de Dea Kulumbegashvili, et je dois dire que je n’ai pas cessé d’y penser depuis. C’était vraiment magistral, parfaitement mesuré et d’une élégante ingéniosité à chaque instant. Je ne peux que le recommander chaudement !
• La Britannique Sophie Littman a été sélectionnée à Cannes avec son court métrage Sudden Light. Celui-ci a été montré cet automne au Festival de La Roche-sur-Yon.

David Pinheiro Vicente
Au commencement de Dea Kulumbegashvili.
• Le Portugais David Pinheiro Vicente a signé le court métrage L’Agneau de Dieu. Sélectionné à Cannes, ce film est actuellement visible sur le site d’Arte.

Natalia Meta
Ondine de Christian Petzold.
• L’Argentine Natalia Meta a dévoilé son film El Profugo en compétition à la Berlinale. Ce film a fait sa première française au Festival de La Roche-sur-Yon.

Tracey Deer
Je vais répondre un film que je n’ai pas vu, mais je suis certaine que c’est un film exceptionnel. Il s’agit du documentaire Inconvenient Indian de Michelle Latimer. Je suis persuadée à 100% que ce sera mon film préféré de l’année.
• Canadienne et Mohawk, Tracey Deer a terminé sur le podium lors des prix du public du Festival de Toronto avec son film Beans.

Niguina Saïfoullaeva
Soul de Pete Docter et Kemp Powers, Drunk de Thomas Vinterberg, ainsi que les films russes Silver Skates de Mikhail Lockshin, Scarecrow de Dmitry Davydov et The Whaler Boy de Philipp Yuryev.
Fidelity de la Russe Niguina Saïfoullaeva a été dévoilé en début d’année à Rotterdam et a été primé au TIFF Romania. Ce film sera visible en salles en 2021.

Magda Guidi
Si je ne devais en retenir qu’un seul, ce serait Souvenir souvenir de Bastien Dubois.
• L’Italienne Magda Guidi a co-réalisé avec Mara Cerri le court animé Sogni al campo, sélectionné à la Mostra de Venise.

Francesca Mazzoleni
Probablement Ema de Pablo Larrain.
• L’Italienne Francesca Mazzoleni a remporté le Grand Prix au Festival Visions du Réel et le prix de la mise en scène au Festival du Cinéma Italien d’Annecy avec son documentaire Punta Sacra.

Lim Jung-Eun
J’ai eu l’impression que 1917 de Sam Mendes était un film qui ne connaissait aucune pause tout au long de la narration. Il attrape le public, sans tact mais avec sincérité. The Irishman de Martin Scorsese est un film qui démontre en quelque sorte ce qu’est le cinéma. Je pensais que les films devaient être projetés dans les salles, mais en regardant celui-ci j’ai eu l’impression que les vrais films pouvaient être vus et ressentis indépendamment de la plateforme.
• La Coréenne Lim Jung-Eun s’est distinguée avec son premier long métrage, Our Midnight, sélectionné à Busan. Elle figure dans notre dossier des révélations coréennes de l’année.

Lily Shaul
Mon film préféré de l’année est Rocks de Sarah Gavron. J’en avais entendu parler il y a quelque temps, mais le virus ayant un peu perturbé sa sortie, j’étais très heureuse de pouvoir finalement le voir quand il est sorti! C’est l’histoire d’une adolescente qui lutte pour faire face après que sa mère l’a abandonnée, elle et son frère. Les jeunes acteurs du film sont incroyables et très crédibles, c’est un très beau film.
• La Britannique Lily Shaul s’est distinguée cette année avec son court métrage d’animation The Slug Finger, sélectionné entre autres au Festival SXSW d’Austin.

Berangere Mc Neese
Antoinette dans les Cévennes de Caroline Vignal : j’ai vu ce film à l’entre-deux confinements. Peut-être était-ce la fatigue, l’émotion de retrouver une salle de cinéma, mais ce film que je pensais léger m’a bouleversée. Laure Calamy y joue une femme qui flirte avec les limites de l’obsession envers un homme dont elle est amoureuse, elle est touchante, drôle, fascinante. Benjamin Lavernhe est parfait, et ce qui s’y joue est intime et universel.
• En compétition en début d’année à Clermont-Ferrand, la Française Berangere Mc Neese figure sur la présélection pour le César 2021 du meilleur court métrage avec Matriochkas.

Gao Yuan
Mon film préféré de l’année est le court métrage finlandais Where to Land de Sawandi Groskind, qui a fait sa première mondiale à Locarno en même temps que mon film.
• Peintre et cinéaste, la Chinoise Gao Yuan a signé le court métrage animé Cloud of the Unknown, sélectionné à Locarno. Elle prépare la version long métrage de ce film.

Seo Hansol & Kwon Min-Pyo
Kwon Min-Pyo : Cette année, j’ai vu le film musical 12 and 24 de Kim Nam-Sek à la Cinémathèque de Séoul, c’est le film le plus impressionnant et intéressant que j’ai vu récemment.
Seo Hansol : Je dirais The Lighthouse de Robert Eggers qui est sorti cette année en Corée, c’est le film qui m’a laissé l’impression la plus forte.
• Le premier long métrage des Coréens Seo Hansol & Kwon Min-Pyo, Short Vacation, a été dévoilé à Busan. Ils figurent dans notre dossier consacré aux révélations 2020 du cinéma coréen.

Luciana Mazeto & Vinícius Lopes
Red Moon Tide de Lois Patiño, qui a été présenté au Forum de la Berlinale. Ce film espagnol nous a hypnotisés dès les premières minutes, et nous a invités dans de nouvelles strates de réalité et d’imagination. Le récit, qui suit un village de pêcheurs paralysés par une malédiction, est ici traité avec simplicité, explorant à travers de longs plans des espaces vides où les personnages semblent prisonniers de leurs pensées (qui résonnent en voix off ) tandis que les forces de la nature règnent autour d’eux. Les éléments concrets acquièrent des significations mythologiques, créant une aura évocatrice de mystère et d’enchantement : une pierre en forme de vague qui a avalé un bateau de pêcheur, trois sorcières qui couvrent la population de draps pour tenter de combattre la malédiction, un fantôme qui entre dans une maison vide, ignorant sa propre immatérialité et enfin un monstre marin hypnotisé par la lumière rouge de la lune. Ce mal qui paralyse est une bonne analogie pour l’année 2020. Nous avons été conquis par les belles images et le texte qui ont été utilisés pour construire ce film.
Irma, co-réalisé par les Brésiliens Luciana Mazeto & Vinícius Lopes, a été dévoilé à la Berlinale et a fait sa première française à La Roche-sur-Yon. Ce film sortira en salles en 2021.

Yeon Park
Mon film préféré de l’année est Dick Johnson is Dead de Kirsten Johnson. J’ai adoré la manière dont le film utilise l’humour et des éléments fictifs pour explorer la question difficile de la mort.
• L’Américaine Yeon Park s’est distinguée avec le court documentaire I Bought a Time Machine, sélectionné notamment au Festival Visions du Réel.

Gillian Wallace Horvat
J’ai vu mon film préféré de l’année (Film About a Father Who de Lynn Sachs) par hasard. Sur le site internet du festival Indie Memphis, quelqu’un avait par erreur remplacé le résumé de ce documentaire par celui du thriller Reunion : “Une femme enceinte retourne chez ses grands-parents récemment décédés pour passer du temps avec sa mère. La réunion familiale vire alors à la terreur”. Je ne regarde pas souvent des documentaires. Ce n’est pas que je ne les aime pas (L’Armée de l’empereur s’avance, Demon Lover Diary et La Grande extase du sculpteur sur bois Steiner font partie de mes préférés) mais honnêtement je préfère les films de genre. Quand j’ai lu ce résumé, j’ai donc cru que c’était une histoire vraie et j’ai immédiatement pris mon billet. Quelques minutes plus tard, un mail du festival m’informait de leur bourde. J’ai décidé de ne pas me faire rembourser, sans pour autant être sûre de regarder le film.

Deux heures avant que le lien n’expire, je trainais dans ma cuisine, alors quitte à avoir payé mon billet, autant regarder le film. Tout en cuisinant, j’ai été absorbée le portrait intime que Sachs fait de son père. Ce dernier est si non-conformiste, à la fois impudique et secret, qu’il m’a beaucoup rappelé mon propre père. Pandémie oblige, je m’étais lancée dans une interminable recette à la Ottolenghi et j’étais constamment au bord des larmes, surtout en voyant la manière dont la réalisatrice fait face à la sexualité polyamoureuse de son père. Je n’ai jamais eu le courage de me poser de telles questions à mes parents, les seuls indices que j’ai pu glanés sont des choses que ma mère laissait échapper quand elle était à bout.

Je ne parle jamais de leur travail aux artistes. J’ai été trop souvent déçue d’avoir rencontré mes héros. Je crois que je ne me remettrais jamais de Thomas Frank qui matait le bas de ma robe lors d’une dédicace. Je me suis pourtant sentie si mise à nue après le film de Sachs que je lui ai envoyé ce message via son site internet : “Chère Lynne. J’ai regardé votre film hier en ligne à Indie Memphis et il m’a beaucoup parlé. Il y a tant de filles qui ne peuvent ou ne veulent pas interroger leurs pères sur leur sexualité, et la façon dont vous l’avez fait était intransigeante en pourtant attentionné. Cela m’a profondément émue et j’ai passé tout le film avec un monologue interne adressé à mon propre père. Ma mère a longtemps essayé de ne pas dire trop de mal de lui, parce qu’elle voulait que lui et moi développions notre propre relation, mais certaines choses qu’elle a laissé échapper m’ont donné envie de ne pas en savoir plus. Honnêtement, même après avoir regardé votre film, je ne pense toujours pas être capable de lui poser des questions sur son passé avec les femmes, mais au moins en ai-je désormais conscience. Vous avez réalisé un très beau film, merci de m’avoir permis de le voir. Chaleureusement, Gillian”. Elle m’a répondu, avec beaucoup de délicatesse. J’imagine que la morale de l’histoire et qu’on peut tout à faire rencontrer ses héros, quand ce sont des héroïnes.
• L’Américaine Gillian Wallace Horvat a signé la comédie I Blame Society, sélectionnée entre autres au Festival de Rotterdam.

Dossier réalisé par Nicolas Bardot & Gregory Coutaut le 28 décembre 2020. Un grand merci à toutes celles et tous ceux qui ont participé.

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