Festival de Sundance | Critique : Desire Lines

Un homme trans irano-américain voyage dans le temps grâce à  un centre d’archives LGBTQ+ . Il rencontre son passé et son présent au cours d’un voyage érotique.

Desire Lines
Etats-Unis, 2024
De Jules Rosskam

durée : 1h21

Sortie : –

Note :

SÉRIEUX COMME LE PLAISIR

Sexy ou sérieux ? Pourquoi faudrait-il choisir un ton pour parler de sexualité ? Au moment d’aborder le thème rare (et plein de surprises) de l’activité sexuelle des hommes trans gay, le cinéaste américain Jules Rosskam n’élimine aucune des deux options, et nous invite à rentrer dans son drôle de film de plusieurs façons. C’est-à-dire un peu comme son protagoniste, qui pénètre dans les couloirs blancs et anonymes d’un bureau d’archives tout ce qu’il y a de plus sérieux mais qui s’imagine déjà sous les néons roses et bleus du plus moite des saunas.

Faisant vigoureusement fi de la binarité des choses, Desire Lines est un long métrage hybride mélangeant fiction et documentaire. C’est d’abord un collage d’entretiens donnant la parole à ceux que l’on entend très rarement. Qu’ils aient développé une homosexualité surprise suite à leur transition ou bien qu’ils aient conservé leur attirance pour les hommes, ces mecs-là ne se font pas prier pour aborder la question du sexe sous plusieurs angles. Cela va du plus direct (la pratique du fist comme moyen d’expérimenter une sexualité d’actif) au plus sérieux (le rapport complexe à la PrEP et au VIH). Cette parole libérée suffit à apporter à cette mosaïque de fraternité trans un grand dynamisme et un air de jamais-vu.

Mais ce travail documentaire est régulièrement entrecoupé par une série d’épisodes fictifs se déroulant dans un centre de documentation consacré à la question trans. Dans ce cadre universitaire glacé comme une morgue, un quadra barbu en quête d’archives fait la connaissance d’un twink excité et maladroit. Desire Lines est beaucoup de choses à la fois, et oui, c’est aussi une comédie romantique. C’est également un film de voyage dans le temps aux sens propres et figurés, un émouvant parcours à la rencontre des « trancestors » oubliés.

Les transitions entre les différentes composantes pourraient certes bénéficier d’un peu plus de fluidité, mais Desire Lines ne manque ni d’humour charmeur ni d’idées à nous transmettre, et c’est bien là le plus important. Par la liberté de sa forme narrative et esthétique, le résultat vient s’inscrire parmi d’autres réussites du cinéma documentaire trans tels Life Is Not a Competition, But I’m Winning, Framing Agnes ou encore Orlando, ma biographie politique.

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par Gregory Coutaut

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