TIFF 2019 | Entretien avec Luke Lorentzen

C’est l’un des singuliers documentaires repérés en festivals cette année : dans Midnight Family, l’Américain Luke Lorentzen suit les nuits d’une famille au volant d’une des rares ambulances d’urgence de Mexico. Dans un déroutant mélange de registres, le film va du tragicomique au pathétique, décrivant la misère sociale et l’horreur économique. Midnight Family était sélectionné cette semaine au Transilvania Film Festival et son réalisateur est notre invité de Lundi Découverte.


Quel a été le point de départ de Midnight Family ?

Je vivais à Mexico et j’ai rencontré la famille Ochoa qui était garée juste en bas de mon immeuble. Ça a été une rencontre très spontanée, et j’ai été suffisamment curieux pour leur demander si je pouvais les suivre, une nuit, dans leur ambulance, pour voir comment ils travaillaient. Ce qui en a résulté, ce sont trois années de tournage avec eux.

Il y a un sentiment d’urgence pendant tout le film. Comment avez-vous travaillé sur le style visuel de Midnight Family pour exprimer cela ?

Je voulais dès le départ que Midnight Family soit comme un immense tour de grand huit. Je voulais donner aux spectateurs l’expérience que j’ai eue moi-même quand j’étais à bord de l’ambulance à tourner le film. La caméra devait être proche de l’action, et je ne voulais pas avoir recours à des interviews ou des voix off qui pourraient affaiblir l’expérience immersive. J’ai tout tourné tout seul, ce qui m’a aidé à obtenir un certain niveau d’intimité qui aurait été difficile avec une équipe plus importante.

Le ton de votre film est assez perturbant car il va du tragicomique avec des protagonistes presque farfelus jusqu’au pathétique et la pure tragédie. Comment avez-vous abordé ces différents tons, à la fois durant le tournage et durant le montage ?

Une des choses qui m’intéressait le plus au sujet des Ochoa était leur capacité à me faire à la fois rire et pleurer en une même nuit. Je savais qu’ils emmèneraient les spectateurs dans de nombreuses directions émotionnelles, mais il était difficile de garder tout ce spectre de sentiments lors du montage du film. Il y avait des montages qui penchaient davantage vers l’humour et d’autres qui étaient plus tragiques. Il a fallu des mois de montage et de premières projections pour enfin trouver le juste équilibre entre ces différents tons.

Quels sont vos cinéastes favoris et/ou ceux qui vous inspirent ?

J’adore tellement de films et réalisateurs différents. Il y a beaucoup de films sortant du Sensory Ethnography Lab qui m’ont beaucoup inspiré lorsque j’ai débuté : des réalisateurs comme Verena Paravel, Lucien Castaing-Taylor et J.P. Sniadecki. Michael Glawogger et Victor Kossakovsky ont également été de grandes influences pour moi tout comme des réalisateurs de fiction tels que les frères Dardenne ou Krzysztof Kieślowski. Ce sont des noms qui vont un peu dans tous les sens mais je pourrais vous en citer encore et encore. Je regarde beaucoup de films de tous les genres.

Quelle est la dernière fois où vous avez eu le sentiment de voir quelque chose de neuf, de découvrir un nouveau talent ?

Honeyland de Tamara Kotevska et Ljubomir Stefanov est un film spécial qui a eu un impact sur moi. Je pense aussi à Apollo 11 de Todd Douglas Miller qui ne ressemble à rien de ce que j’ai pu voir auparavant.

Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 30 mai 2019

Photos : Courtesy of Sundance Institute

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