TIFF 2019 | Critique : Midnight Family

A Mexico, seulement 45 ambulances d’urgence sont mises en place par les pouvoirs publics alors que la ville compte neuf millions d’habitants. Dans les quartiers les plus riches, la famille Ochoa gère une ambulance privée. Tandis que les Ochoa tentent de gagner leur vie dans cette industrie impitoyable, ils luttent pour que leurs besoins financiers ne compromettent pas la confiance que les personnes en situation d’urgence leur ont confiée.

Midnight Family
Mexique, 2019
De Luke Lorentzen

Durée : 1h21

Sortie : –

Note :

UNE AFFAIRE DE FAMILLE

Sur quel pied doit-on danser devant Midnight Family, documentaire réalisé par l’Américain Luke Lorentzen (lire notre entretien) ? Midnight Family fait partie de ces longs métrages dont la qualité (précieuse) est la position instable dans laquelle le spectateur est placé. C’est un film qui débute comme une tragicomédie, car si l’on parle d’événements terribles (la famille en question conduit une ambulance transportant des personnes en souffrance et nécessitant des soins urgents), le ton est d’abord assez léger. On parle des « fractures les plus folles » avec un étrange détachement, on s’applique de la laque avec soin pour conduire tout en étant stylé. Les fusillades sont jugées comme « cool » et puis, avec un irréfutable bon sens populaire, on estime que « s’il n’y a pas de morts, les employés des pompes funèbres ne mangeraient pas« . « C’est la « réalité« , ponctue l’un des protagonistes.

On ne doute pas qu’à l’arrière de la voiture, personne ne rit. Mais le décalage observé par Lorentzen est spectaculaire. La famille est là pour le business, et pour l’adrénaline aussi. Le réalisateur filme des poursuites ahurissantes entre ambulances privées qui font la course au biffeton. C’est excitant, c’est aussi inconscient. Midnight Family décrit la jungle urbaine de Mexico, où les lumières des ambulances éclairent la nuit noire et où l’effet stroboscopique devient curieusement fascinant.

Mais du tragicomique, le film dérive nettement vers le pathétique qui lui n’a plus rien de drôle. Peu à peu, Midnight Family décrit la misère sociale et l’horreur économique. C’est une jeune fille sans argent, battue par son copain, qui ne sait si elle peut s’offrir une ambulance. C’est une accidentée qui va mourir. Et c’est cette famille qui roule à tombeau ouvert et qui ne fait que survivre. « Peu importe le protocole« , entend-on. S’il est un peu répétitif, le film saisit une urgence tragique et l’absurdité d’un système économique déshumanisé à l’extrême. On embarque dans cette ambulance mais aussi dans une réalité où une vie humaine, sans argent, ne vaut rien.

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par Nicolas Bardot

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