Festival CPH:DOX | Critique : Night of the Coyotes

Pour éviter de devenir une ville fantôme, un village mexicain invente un jeu de rôle qui offre aux touristes la possibilité de vivre une authentique migration illégale à travers la frontière américaine, avec la participation de gangsters et de la police des frontières. 

Night of the Coyotes
Autriche, 2024
De Clara Trischler

Durée : 1h18

Sortie : –

Note :

LA NUIT DES HÉROS

Tout commence par des images tournées de nuit par un téléphone portable dans un climat d’urgence. Un petit groupe de personnes court se cacher tandis que des coups de feu se font entendre. Ces scènes captées à la frontière entre Mexique et Etats-Unis évoquent celles, encore plus rares, filmées à la frontière des deux Corées dans le stupéfiant documentaire de 2023 Beyond Utopia. Sauf qu’ici tout est pour de rire. Le village mexicain d’El Alberto, où se déroule la scène, se situe en réalité à 1000 kilomètres de la frontière et ce à quoi on vient d’assister n’est qu’une mise en scène créée pour divertir les touristes.

Voilà la parade que les habitants d’El Alberto ont trouvé pour renflouer les caisses de leur ville quasi fantôme : faire vivre à des touristes le grand frisson d’une nuit dans la peau de clandestins voulant traverser la frontière américaine illégalement. La reconstitution n’y va pas de main morte et les touristes se retrouvent hébétés à assister à des faux meurtres sanglants et même de faux viols (il faut voir pour le croire des jeunes Mexicaines se porter volontaires pour cette tâche particulièrement malaisante). Puis un cut, le film nous fait soudain retrouver les mêmes touristes le lendemain au bord de leur piscine de luxe… Il y a là une ironie qui n’étonne pas de la part d’une production germano-autrichienne.

Mais Night of the Coyotes respecte trop les personnes qu’elle filme pour chercher à faire rire. Tant mieux, mais si la  réalisatrice Clara Trischler a le bon goût d’interroger les locaux plus que les visiteurs, elle n’explore qu’en surface le potentiel de cette situation de fou. Car si El Alberto est devenu quasi désert, c’est justement parce que de nombreux habitants ont choisi de passer la frontière pour de bon, pour ne jamais revenir. Night of the Coyotes aurait pu pousser le malaise encore plus loin, mais il donne néanmoins à voir l’étonnante tragicomédie à l’œuvre dans ce village obligé de rejouer son propre malheur pour rire. 

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par Gregory Coutaut

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