Quels sont les films à ne pas manquer en avril ? Le Polyester vous propose sa sélection de longs métrages à découvrir en salles.
• Le Mal n’existe pas, Ryusuke Hamaguchi (10 avril)
L’histoire : Takumi et sa fille Hana vivent dans le village de Mizubiki, près de Tokyo. Comme leurs aînés avant eux, ils mènent une vie modeste en harmonie avec leur environnement. Le projet de construction d’un « camping glamour » dans le parc naturel voisin, offrant aux citadins une échappatoire tout confort vers la nature, va mettre en danger l’équilibre écologique du site et affecter profondément la vie de Takumi et des villageois…
Pourquoi il faut le voir : Grand Prix à la dernière Mostra de Venise, Le Mal n’existe pas parvient, avec la grande finesse qui caractérise le Japonais Ryusuke Hamaguchi, à déjouer le manichéisme. Tout est trouble et mouvant dans Le Mal n’existe pas, et le cinéaste semble toujours suggérer qu’il y a quelque chose d’indicible derrière les images que l’on croit voir très nettement.
• Enys Men, Mark Jenkin (10 avril)
L’histoire : Sur une île inhabitée des Cornouailles, une bénévole passionnée de vie sauvage se livre à des observations quotidiennes sur une fleur rare. Sa vie est hypnotique dans sa monotonie, elle répète les mêmes gestes jour après jour, comme un rituel. Au fur et à mesure, des sons et des images provenant d’autres temporalités commencent à s’infiltrer, perturbant progressivement son équilibre.
Pourquoi il faut le voir : Sélectionné à la Quinzaine, Enys Men est une fascinante merveille qui largue les amarres du réel, utilisant et redistribuant avec un appétit contagieux les éléments de la folk horror. Déjà auteur du singulier Bait, le Britannique Mark Jenkin signe un voyage hypnotisant, une œuvre brève et stupéfiante comme une éclipse.
• Semaine sainte, Andrei Cohn (10 avril)
L’histoire : Au début du XXe siècle, dans un petit village roumain, les tensions entre Leiba, un aubergiste juif, et son employé chrétien, Gheorghe, atteignent leur point de non-retour lorsque ce dernier promet de venir régler ses comptes la nuit de Pâques…
Pourquoi il faut le voir : Dévoilé dans l’excellente sélection Forum de la dernière Berlinale, Semaine sainte est un film aux compositions formelles stupéfiantes, où la profondeur de champ donne parfois le vertige et où le cinéaste installe une nervosité féroce. Le long métrage a beau se dérouler au 15e siècle, il ne nous parle de rien d’autre que de notre monde d’aujourd’hui.
• Sans cœur, Nara Normande & Tião (10 avril)
L’histoire : Été 1996, Nordeste Brésilien, Tamara profite de ses dernières vacances avant de partir à Brasilia pour ses études. Un jour, elle entend parler d’une fille surnommée « Sans Cœur » à cause de la cicatrice qui lui traverse la poitrine. Tamara ressent une attirance immédiate pour cette fille mystérieuse, qui va grandir tout au long de l’été.
Pourquoi il faut le voir : Remarquée avec son beau court métrage Guaxuma, la Brésilienne Nara Normande signe avec son compatriote Tião un premier long sélectionné à la Mostra de Venise. Ce récit initiatique produit par Kleber Mendonça Filho est traversé par une charmante langueur et privilégie l’atmosphère à un récit aux étapes précises. Qu’elle soit fantastique ou sentimentale, il y a dans Sans cœur une touchante étincelle.
• Knit’s Island, l’île sans fin, Ekiem Barbier, Guilhem Causse & Quentin L’helgoualc’h (17 avril)
L’histoire : Quelque part sur internet existe un espace de 250 km² dans lequel des individus se regroupent en communauté pour simuler une fiction survivaliste. Sous les traits d’avatars, une équipe de tournage pénètre ce lieu et entre en contact avec des joueurs. Qui sont ces habitants ? Sont-ils réellement en train de jouer ?
Pourquoi il faut le voir : Knit’s Island est un passionnant ovni, composé uniquement d’images captées lors de parties du jeu en ligne. Cette révélation, au croisement inattendu entre documentaire, film d’animation et jeu vidéo, est un road movie tentaculaire en même temps qu’une expérience sociologique. Au bout du chemin, les cinéastes (lire notre entretien) dépeignent de manière étonnamment émouvante une vraie communauté.
• Civil War, Alex Garland (17 avril)
L’histoire : Dans un futur proche où les États-Unis sont au bord de l’effondrement et où des journalistes embarqués courent pour raconter la plus grande histoire de leur vie : La fin de l’Amérique telle que nous la connaissons.
Pourquoi il faut le voir : Le Britannique Alex Garland dépeint une société à la fois dystopique et familière dans ce thriller réaliste à la brutalité sèche, dont la tonalité adulte évoque le cinéma de Kathryn Bigelow. La toujours impeccable Kirsten Dunst brille dans ce long métrage dense et percutant, en forme d’hommage aux reporters de guerre.
• Occupied City, Steve McQueen (24 avril)
L’histoire : Dans Occupied City, une caméra inquisitrice arpente les rues animées d’Amsterdam en 2020, alors que la ville se remet à peine de la pandémie. Dans le même temps, le film convoque les habitants et les souvenirs du passé, disséminés sur la carte de la ville et tissés dans la trame même de ses rues et de ses bâtiments.
Pourquoi il faut le voir : Sélectionné au Festival de Cannes, ce documentaire du Britannique Steve McQueen pose une question passionnante (comment témoigner de l’Histoire dans une ville où les traces du passé ont disparu ?) sans offrir de réponse simpliste. La longueur et les répétitions peuvent constituer une sacrée épreuve de patience (le film dure 4h22), mais elles créent aussi un effet sidérant de violente hypnose.
• Un jeune chaman, Lkhagvadulam Purev-Ochir (24 avril)
L’histoire : Zé a 17 ans et il est chaman. Il étudie dur pour réussir sa vie, tout en communiant avec l’esprit de ses ancêtres pour aider les membres de sa communauté à Oulan-Bator. Mais lorsque Zé rencontre la jeune Maralaa, son pouvoir vacille pour la première fois et une autre réalité apparaît.
Pourquoi il faut le voir : Dévoilé à la Mostra de Venise, ce premier long métrage de la Mongole Lkhagvadulam Purev-Ochir parvient avec une certaine sensibilité à ne pas être figé dans la carte postale. Si la cinéaste décrit avec tendresse les premières heures d’un amour, le film gagne aussi en relief à travers sa description amère d’une solitude à un âge qui devrait être celui de tous les possibles.
Nicolas Bardot
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