Critique : Morrison

Jimmy, une ancienne popstar de 40 ans devenue ingénieur, est envoyé dans la région de son enfance pour superviser la rénovation d’un vieil hôtel. Une fois installé, Jimmy découvre que l’hôtel, autrefois flamboyant, est devenu une ruine, un labyrinthe de couloirs étroits et une relique d’une époque révolue, qui porte encore les cicatrices de l’occupation américaine. Au cœur de ce lieu mystérieux, Jimmy va errer entre le rêve et le rêve et le fantasme et retracer l’histoire de sa famille.

Morrison
Thaïlande, 2023
De Phuttiphong Aroonpheng

Durée : 1h46

Sortie : 27/03/2024

Note :

OMBRES ET LUMIÈRES

Le Thaïlandais Phuttiphong Aroonpheng (lire notre entretien) a été révélé en 2018 avec Manta Ray, qui figure dans notre dossier des meilleures découvertes de ces cinq dernières années. Ce film visuellement superbe, peuplé de visions stupéfiantes, parvenait de manière stimulante à marier récit politique et poétique. On reconnaît sa patte dans Morrison, son second long métrage, qui fait sa première mondiale au Festival de Busan. Malheureusement, Morrison tombe à nos yeux dans l’écueil du « deuxième film ».

Tous les ingrédients semblent pourtant réunis ; Aroonpheng retrouve d’ailleurs ses talentueux collaborateurs de Manta Ray comme le directeur de la photographie Nawarophaat Rungphiboonsophit ou le duo Snowdrops. Mais le récit labyrinthique rigidifie le long métrage, les interactions entre les protagonistes sont souvent figées et là où le minimalisme de Manta Ray ne posait jamais problème, la place laisée à l’histoire dans Morrison a tendance, à nos yeux, à alourdir le film. Celle-ci porte pourtant en elle des pistes intéressantes, telles la présence américaine en Thaïlande et les métaphores politiques.

Filmer ce vieil hôtel semble davantage concerner le cinéaste, et c’est là une réussite. Le film est d’une grande élégance, avec un travail soigné sur les lumières et les couleurs, dans ce lieu contemplé comme un espace mental et fantomatique. On regrette parfois que le long métrage ne soit pas plus dépouillé et ne laisse pas davantage de place au sens de l’atmosphère et au pouvoir d’évocation dont fait preuve Aroonpheng. Cela se confirme lorsque vient une fulgurance – la séquence dite de la boule à facettes en fin de film laisse entrevoir ce que Morrison aurait pu être. Si le résultat est selon nous inégal, ces étincelles montrent que Phuttiphong Aroonpheng reste un cinéaste à suivre.

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par Nicolas Bardot

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