Festival de Busan | Critique : Following the Sound

Un jour, Haru, 25 ans, employée de librairie, retrouve Takeshi, 45 ans, qu’elle a rencontré pour la première fois il y a des années. À une autre occasion, Haru se fait du souci pour Yukiko, 40 ans, assise sur un banc devant la gare. Elle se met à lui parler…

Following the Sound
Japon, 2023
De Kyoshi Sugita

Durée : 1h24

Sortie : –

Note :

MÉLODIE EN SOUS-SOL

Très tôt dans Following the Sound, on peut voir la protagoniste appuyer sur le bouton on de son walkman. Quelle chanson écoute-telle ? S’agit-il seulement des sons de la rivière voisine ? Quel est ce son qu’elle s’apprête à suivre ? Déjà dans son précédent long métrage, le superbe Haruhara San’s Recorder (resté inédit en France mais montré au FID Marseille et à Entrevues Belfort), le Japonais Kyoshi Sugita réservait une place de choix au mystère. Encore une fois chez le cinéaste, le mystère est un moteur invisible, une pelote magique que l’on est invité à dérouler.

Il y a une étrange tension immédiate qui s’installe entre les personnages de Following the Sound. Haru ressent le besoin d’aider son prochain, mais il y a souvent une ellipse sur le degré d’intimité entre les personnages, sur leur possible passé commun. Les émotions peuvent être indéchiffrables : qui ici arbore un masque ? Sugita apporte une attention particulière au silence qui habite une librairie ou une cuisine. Le cinéaste sait mettre en scène un rapport extra-sensible aux gens, aux objets – et aux omelettes. Tout est minimaliste, mais tout fait preuve d’une grande ambition.

Kyoshi Sugita travaille à nouveau avec Yukiko Iioka, sa directrice de la photographie de Haruhara San’s Recorder. Son image est feutrée, d’une grande délicatesse. Le film a beaucoup de charme tout en n’ayant jamais peur d’être franchement radical, il tire le meilleur de cet effet de soustraction, de cette aura énigmatique. L’élégance épurée peut parfois côtoyer un côté cryptique, mais il y a aussi un pouvoir spécial dans le fait de s’abandonner au cœur de ce labyrinthe miniature. À quelle époque l’histoire se déroule-t-elle au juste ? À quoi songe l’héroïne pensive au coin de la rue ? Quels secrets partage-t-on, quels sentiments se cachent derrière cette étreinte ?

Lors de notre précédent entretien, Sugita nous parlait de son admiration pour Ryusuke Hamaguchi et les frères Zürcher. Il y a en effet chez lui comme une parenté : le délicat et parfois insaisissable souci des autres qu’on retrouve chez Hamaguchi, mais aussi une fausse froideur énigmatique propre au cinéma des Zürcher. Sugita parvient in fine à trouver son propre regard, aussi fragile que précieux.

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par Nicolas Bardot

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