Festival d’Annecy | Entretien avec Yoriko Mizushiri

C’était l’un des ovnis de la dernière Quinzaine des Réalisateurs : le court métrage Anxious Body de la Japonaise Yoriko Mizushiri est un kaléidoscope de sensations délicieusement bizarres dans lequel des objets, des lignes et des formes traversent l’écran en un étonnant mélange de douceur et d’étrangeté. La cinéaste nous parle de cette curiosité ludique, mystérieuse et stimulante sélectionnée au Festival d’Annecy.


Quel a été le point de départ de Anxious Body ?

Jusqu’à mon tout dernier travail, j’avais pour habitude de baser l’entière composition de mes films sur l’idée de « la sensation et l’enchaînement des sensations ». Avec Anxious Body, j’ai voulu faire quelque chose de différent. Mon objectif était de faire un film d’animation qui n’apporte aucun message ou sens particulier aux spectateurs afin que ces derniers puissent s’immerger avec leurs sens, de manière viscérale, dans cette animation tactile.

Pouvez-vous nous en dire davantage sur le style visuel que vous avez choisi pour raconter cette histoire ?

Mon intention était de créer une image qui donne à la fois une impression de douceur et de force. La chose la plus importante, c’était les lignes, les contours. Il fallait qu’elles puissent transmettre la tendresse et la clarté des mouvements. J’ai terminé le film en ajustant progressivement l’équilibre des couleurs.

Comment avez-vous abordé ce dialogue surprenant et délicat entre la douceur et l’étrangeté dans votre film ?

En utilisant des textures et des motifs familiers que vous pouvez côtoyer dans votre vie quotidienne, j’ai voulu créer une composition qui fusionnerait progressivement les sentiments de réalité et d’empathie, qui procurerait une agréable sensation de douceur tout en générant un sentiment d’anxiété. J’ai utilisé comme motifs des objets mais aussi des formes qui n’existent pas physiquement dans l’espace, tels des triangles et des lignes. En combinant entre eux ces objets aux caractéristiques différentes, j’espérais insuffler un sentiment d’étrangeté, une forme d’anxiété.

Qui sont vos cinéastes de prédilection et/ou qui vous inspirent ?

J’adore l’œuvre de Koichiro Tsujikawa, plus particulièrement sa façon de se concentrer sur le mouvement. Ses images, qui sont à la fois délicates et dynamiques, mignonnes et folles, ont un pouvoir incroyable et attirent irrésistiblement le regard. Je suis une fan de son travail depuis longtemps et il est l’un des quelques artistes à m’avoir vraiment influencée.

L’animation de Masanobu Hiraoka se caractérise par des mouvements très doux et fluides. Contrairement à mon style d’animation, chaque mouvement chez lui est très fugace, mais  j’ai le sentiment étrange que chaque moment est très long. J’ai l’impression que l’animation de M. Hiraoka évolue à un rythme très rapide, et en tant qu’animatrice, je le respecte beaucoup.

Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 7 juillet 2021. Un grand merci à Nobuaki Doi et Luce Grosjean. 

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