TIFF 2023 | Critique : Tigru

Vera, 31 ans, est une vétérinaire de zoo d’une petite ville de Transylvanie. Après avoir perdu son nouveau-né, elle est obsédée par l’idée de donner les rituels d’enterrement orthodoxe de l’Est, passant plus de temps au travail et s’éloignant de son mari, Toma. Un jour, le tigre du zoo s’échappe…

Tigru
Roumanie, 2023
De Andrei Tănase

Durée : 1h20

Sortie : –

Note :

LE TIGRE QUI PLEURE

Une vétérinaire (interprétée par Cãtãlina Moga, qu’on a pu voir entre autres chez Cristi Puiu), plutôt habituée à soigner des chats, se retrouve à gérer un bien plus gros matou dans la petite ville de Transylvanie où elle habite. Un tigre, ancienne propriété d’un kéké du coin, est accueilli dans un zoo – mais l’appel de la nature risque d’être le plus fort. Tigru, premier long métrage du Roumain Andrei Tănase, aurait pu être alourdi par la tentation de la personnification : on croit voir venir la fable qui dresserait des parallèles entre la vie de l’héroïne (endeuillée et dans l’impasse) et celle de l’animal (emprisonné et en quête de liberté). Il y a un peu de cela dans Tigru, mais le film se montre finalement plus inattendu.

La forêt de Transylvanie traversée par les protagonistes a beau être à proximité de la ville, celle-ci est peuplée de bêtes sauvages : les serpents croquent les pieds, les ours, dit-on, rôdent, et c’est désormais un tigre qui se promène. Où qu’il se trouve, le tigre est une présence incongrue : chez un particulier, au bord d’une piscine, en liberté. Les personnages courent après cette absurdité tandis que le film varie les registres avec fluidité. C’est un drame intime et réaliste dans la lignée de ce que le cinéma contemporain roumain peut produire. Mais c’est aussi un survival d’action minimaliste : le segment en forêt a des faux-airs… de Jurassic Park.

En cela, Tigru évoque un exemple récent de film roumain imprévisible, lui aussi en pleine nature : Intregalde de Radu Muntean. Mais à la farce féroce de ce dernier succède ici une étrange tranquillité. Les blocs d’unité de lieu et de temps se succèdent : le zoo la nuit, le groupe dans la « jungle », la chasse finale. Cette construction est à la fois simple et imprévisible, elle cherche davantage à installer des respirations qu’à couper le souffle. Il y a, au premier plan, l’aventure triste et pathétique de cette chasse au tigre (inspirée de faits réels). En creux, il y a aussi un portrait humain d’une touchante mélancolie, soulignée entre autres par la musique de Jean-Benoît Dunckel (Air).

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par Nicolas Bardot

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