Critique : L’Impitoyable lune de Miel ! / Les Mutants de L’espace

L’Impitoyable lune de miel ! : l’histoire désopilante et décapante de deux jeunes mariés, Grant et Keri Boyer, dont le mariage est mis à mal par la chute, sur le toit de leur maison, d’un couple d’oiseaux en train de s’accoupler.

Les Mutants de l’espace : l’astronaute Earl Jensen va s’envoler pour une mission dans l’espace dirigée par le Dr Frubar, laissant derrière lui sa petite fille de cinq ans, Josie. Le lancement est un succès, mais le Dr Frubar a d’autres projets en tête. Faisant croire à un incident, il abandonne Earl dans l’espace et fait accuser Josie qui a été témoin de son geste…

L’Impitoyable lune de miel ! / Les Mutants de l’espace
Etats-Unis, 1997/2001
De Bill Plympton

Durée : 1h13/1h23

Sortie : 15/03/2023

Note :

LE DIABLE AU CORPS

Deux des longs métrages les plus illustres de l’Américain Bill Plympton, L’Impitoyable lune de miel ! et Les Mutants de l’espace, ressortent au cinéma en version restaurée. L’Impitoyable lune de miel ! s’ouvre par une citation de Pablo Picasso qui semble tout à fait adhoc pour caractériser le cinéma de Plympton : « Le bon goût, quelle horreur ! Le bon goût est l’ennemi de la créativité ». De fait, le long métrage, réalisé en 1997, s’ouvre sur l’image d’un piaf lubrique qui se jette sur l’une de ses congénères, ce qui va avoir des conséquences inattendues sur la vie du couple formé par Grant et Keri.

L’humour chez Bill Plympton, qui a d’abord été caricaturiste, est avant tout physique : les corps sont surdimensionnés, les visages grotesques, les seins sont des baudruches, les énucléations sont un gag tandis qu’un corps ensanglanté peut servir de planche de skate board. Il y a là l’énergie d’un slapstick, un art vertigineux de la digression absurde, tandis que l’énergie crayonnée traduit au mieux l’étrange tension fiévreuse du long métrage. Tout cela n’aurait aucun sens ? Cette comédie raconte pourtant avec une certaine acuité les insurmontables difficultés de la conjugalité.

Réalisé quatre ans plus tard, Les Mutants de l’espace est peut-être encore plus radical. Et là encore, on note une adéquation totale entre la forme et la fond, avec ce style crayonné explosif, ces éclats de sauvagerie qui donnent une dimension dangereuse au cartoon. Les Mutants de l’espace et un déluge lunaire, gore et échevelé, fait de baises et de cataclysmes. Mais le désastre n’est-il pas ce qui peut arriver de mieux aux humains dans le cinéma de Plympton ?

Derrière l’aspect potache et non-sensique, le cinéaste se montre iconoclaste, politique, et toujours méfiant vis-à-vis de l’autorité. Le chaos dans Les Mutants de l’espace peut être tour à tour mordant, cruel mais aussi joyeux – à l’image de son surprenant dénouement. Dans son cinéma de la déformation, les mutants se mêlent assez naturellement aux humains. Alors que Bill Plympton prépare un nouveau film intitulé Slide, cette double ressortie est l’occasion de redécouvrir ces singulières comètes, qui ont toutes les deux été couronnées par le Cristal du meilleur long métrage à Annecy.

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par Nicolas Bardot

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