Berlinale | Critique : Limbo

Le détective Travis Hurley arrive dans une petite ville de l’arrière-pays australien pour enquêter sur l’homicide non résolu d’une femme aborigène, vieux de vingt ans.

Limbo
Australie, 2023
De Ivan Sen

Durée : 1h48

Sortie : –

Note :

L’HOMME QUI TOMBE À PIC

Vingt et un ans après Beneath Clouds qui avait remporté le prix du meilleur premier film, le cinéaste australien Ivan Sen fait aujourd’hui son retour en compétition au Festival de Berlin avec Limbo, et on ne peut pas dire que le réalisateur ait peur des archétypes. Mi-polar mi-western, Limbo met face-à-face dans le désert un flic taiseux et une communauté blessée, deux puissances qui vont s’affronter autour d’une affaire non élucidée avant de se guérir mutuellement. Le sable a beau s’étendre partout à l’horizon dans ce coin du bush écrasé par le soleil, la piste que s’apprête à suivre le film pourrait difficilement être davantage balisée.

S’il y a un twist à chercher, c’est plutôt du côté de la mise en image qu’il faudrait regarder, car Ivan Sen  mélange un scénario de film policier et une mise en scène de slow cinéma. Or la recette est plus intéressante sur le papier que dans l’assiette pour cause de manque d’équilibre. Du cinéma d’auteur, Sen ne reproduit que certaines apparences : sa lenteur n’a pas grand chose de radical et son noir et blanc ressemble plutôt à une illustration pataude et très littérale du racisme des personnages.

La lourdeur de l’image s’ajoute à celle du scénario (oui ce flic blanc déglingué va bien entendu devenir le père/frère/mari rêvé pour ces membres de la communauté aborigène), mais aussi à celle de la direction d’acteur. Le regard perdu vers l’horizon tel l’homme majuscule qu’il incarne, Simon Baker traverse le film avec des poses de cowboy tellement appuyées qu’on a parfois l’impression de voir un drag king surjouer délibérément la masculinité. Inutile de chercher l’ironie ici, après tout le titre du film est un néon géant qui clignote littéralement sous notre nez. Il n’y a hélas aucun doute que sous toutes ses couches de sérieux (sous lequel il est difficile de respirer), Limbo ne possède pas un point de vue suffisamment contemporain pour nous faire gober ce lourd catalogue de clichés virils ringards.

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par Gregory Coutaut

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