Critique : L’Etoile filante

Boris est un barman qui vit dans la clandestinité après son implication dans un attentat. Son passé refait surface quand une victime le retrouve pour se venger. La rencontre avec le dépressif et solitaire Dom, son sosie, est le moyen parfait pour échapper à la vengeance. Mais Boris ignore l’existence de Fiona, détective privée, qui enquête sur la soudaine disparition de son ex-mari Dom.

L’Etoile filante
Belgique, 2023
De Dominique Abel & Fiona Gordon

Durée : 1h38

Sortie : 31/01/2024

Note :

FAISONS LA COURSE SAUGRENUE

Que boit-on au bar nommé L’Étoile filante, dans lequel gravitent tous les personnages du film éponyme ? Une bière bien sûr. C’est la toute première réplique du film, déclamée avec un ton outré qui décontenance d’emblée. Mais une bière servie avec un amateurisme délirant et chaotique par un faux serveur, comme le montre plus tard une autre scène. Et quel cocktail boit-on au comptoir des cinéastes Fiona Gordon et Dominique Abel, qui signent ici leur cinquième long métrage ? On reconnait de nombreux points familiers de leur recette burlesque habituelle, mais l’ivresse procurée n’est pas émoussée pour autant.

Si les personnages des films précédent d’Abel et Gordon possédaient souvent une forme d’innocence un peu béate, les sombres protagonistes de L’Étoile filante semblent cette fois sortir d’un catalogue d’archétypes de films noirs : une femme fatale manipulatrice, un malabar taiseux et menaçant, une détective privée alcoolique et même un ex-terroriste en cavale, tous guidés par de sombres motivations. Les personnages ont beau être peu nombreux et bien identifiés, ce récit farfelu d’enlèvement et de réglement de compte donne régulièrement l’impression entêtante de trop s’alambiquer. C’est sans doute que, comme souvent chez le duo de cinéastes, la magie n’opère jamais aussi bien que lorsque le film abandonne joyeusement sa trame narrative.

C’est en effet quand le film déraille, aux sens propres et figurés, qu’il brille le plus. A de nombreuses reprises s’opère la même formule charmante : quand une scène fait soudain fi de vouloir raconter quelque chose, que les personnages se taisent et se mettent à laisser parler leurs corps, donnant lieu à des chorégraphies lunaires et un humour physique qui fait mouche. L’Étoile filante est riche en trouvailles visuelles, avec son sens du détail absurde et son univers doux-amer de film noir coloré et aviné évoquant Aki Kaurismäki, mais c’est dans ces éclats suspendus (une course poursuite qui se transforme en danse collective, un alcool si fort qu’il fait tomber du tabouret, un costume impossible à enfiler rapidement…) que le film dévoile le mieux sa folie douce et sa poésie.

| Suivez Le Polyester sur Twitter, Facebook et Instagram ! |

par Gregory Coutaut

Partagez cet article