La Roche-sur-Yon | Critique : Le Sorelle Macaluso

Des sœurs vivent ensemble, au sixième étage d’un appartement en banlieue de Palerme. Ce lieu porte les marques du temps qui passe, tout comme la famille qui y a grandi. C’est l’histoire de ces femmes, d’une famille, de celles qui partent, celles qui restent et celles qui résistent.

Le Sorelle Macaluso
Italie, 2020
De Emma Dante

Durée : 1h29

Sortie : –

Note :

QUI SE SOUVIENDRA DE NOUS ?

Il était une fois des jeunes sœurs qui vivaient à Palerme. Comme dans un conte, les sœurs Macaluso semblent vivre seules, sans adulte autour d’elles, sans obstacle entre elles et le monde extérieur qu’elles ont hâte d’aller dévorer ensemble. Comme dans un conte, elles vivent entourées d’animaux domestiques qui leur ressemblent (des sages colombes qui ne demandent qu’à s’envoler au loin). La vie n’est pourtant pas enchantée dans ce quartier en ruines, situé à la marge de la marge. En dehors de leur appartement-terrain de jeu, c’est la dure réalité qui les attend, et lorsqu’elles trouvent une baguette magique crasseuse oubliée par terre, aucune n’est dupe de son pouvoir.

Le Sorelle Macaluso donne l’impression de vouloir sur-performer l’Italie à la moindre occasion. Les émotions ne sont pas exprimées, elles sont hurlées. On exagère, on danse la vie, emporté par un tourbillon en pleine rue, on se crie les pires insultes aux visages à coups de grimaces, le tout sur des airs de variété populaire italienne. La réalisatrice et dramaturge Emma Dante (qui adapte ici sa propre pièce) est généreuse mais n’a pas la main leste, usant de symboles à gogo et d’une théâtralité souvent outrée, parfois carrément ringarde. Mais si sa baguette magique est usée, elle réussit quand même quelques vrais beaux tours.

Cela peut paraître paradoxal, mais la meilleure qualité des Sorelle Macaluso ce sont ses ellipses, particulièrement émouvantes. Derrière une agitation de façade, le film évolue sans crier gare. Le temps passe dans l’appartement comme dehors, donnant à leur isolement une épaisseur poignante. Les décennies passent dans un vertige, jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien de leurs jeux d’enfants entre ces murs. La première scène du film montre les fillettes percer un trou dans une cloison pour mieux voir dehors. Au final, le monde qu’elles voulaient conquérir ne contient presque plus de traces d’elles.

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par Gregory Coutaut

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