Critique : Fifi

Cherchant à fuir l’atmosphère chaotique de son milieu familial, Sophie, 14 ans, s’introduit chez une amie partie en vacances pour l’été. Mais dans le bel et vaste appartement qu’elle croyait déserté pour tout juillet, elle tombe sur Stéphane, 22 ans, le frère aîné de son amie…

Fifi
France, 2022
De Jeanne Aslan & Paul Saintillan

Durée : 1h49

Sortie : 14/06/2023

Note :

UNE CHAMBRE A SOI

Chez elle, Sophie (dite Fifi) n’est pas à sa place. Dans l’appartement familial bondé qui déborde de sentiments intenses et d’enfants qu’on engueule, il n’y a quasiment plus de place pour elle. Sa chambre à soi, elle va la trouver ailleurs, là où elle n’est pourtant précisément pas chez elle. Sur un coup de tête, la voilà qui dérobe les clés de la maison bourgeoise d’une ancienne amie croisée par hasard, au moment où celle-ci s’apprête à partir en vacances. En catimini, Fifi fait donc son nid dans ce foyer vide et calme qui n’est pas le sien.

Les scènes familiales sur lesquelles s’ouvre Fifi sont suffisamment assommantes de cris pour qu’on n’envie pas la jeune héroïne. Outre leur niveau sonore, ces scènes n’y vont pas de main morte sur les archétypes concernant les pauvres avec un cœur gros comme ça (telle la maman vulgaire qu’on voit partout dans le cinéma français depuis les premiers films de Xavier Dolan). Quand Sophie s’incruste en cachette dans une maison si bien rangée qu’elle ressemble à un canevas neuf, on a hâte de voir s’épanouir son personnage, et le film avec. C’est alors qu’arrive un autre visiteur, le frère aîné de son amie censé garder la maison en leur absence. Ce dernier devrait en toute logique mettre Fifi dehors, et pourtant il l’invite à rester. C’est cet étrange pacte qui marque à nos yeux le vrai point de départ du film.

Qu’ont ces deux jeunes gens derrière la tête en se formulant une telle proposition ? S’il y a de quoi être intrigué par la question, il y a encore plus de raison de l’être face à la joyeuse absence de réponse. Les jours d’été passent sur cette cohabitation des protagonistes, et c’est presque tout. Cela pourrait paraitre peu, mais il y a quelque chose d’enthousiasmant dans ce contrepoint. Fifi raconte une histoire d’adolescents dans lequel l’apprentissage (si tant est qu’il y en ait un, et s’il n’y en a pas est-ce important ?) ne passe ni par un premier amour ni par la sexualité. Cet équilibre charmant ne tient peut-être pas jusqu’au dénouement final, et souffre peut-être de la manière fort différente dont jouent Quentin Dolmaire et la charismatique Céleste Brunnquell. Fifi rattrape néanmoins ses imperfections avec une bienveillance sans naïveté, et une sorte de torpeur charmante.

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par Gregory Coutaut

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