Festival Black Movie | Critique : Critical Zone

Guidé par la voix de son GPS, Amir sillonne les bas-fonds de Téhéran en pleine nuit pour soulager les âmes en peine.

Critical Zone
Iran, 2023
De Ali Ahmadzadeh

Durée : 1h39

Sortie : –

Note :

ZONE DE CONFORT

De nuit, les rues de Téhéran sont désertes et silencieuses. L’un des rares véhicules à venir troubler cette paix apparente est une ambulance que la caméra suit de très près. Bizarrement, celle-ci privilégie les tunnels anonymes et autres souterrains discrets aux grand axes extérieurs. Cela ne nous est pas révélé tout de suite, mais le conducteur a de bonnes raisons de faire profil bas, car le type d’aide qu’il apporte à ses patients n’est pas de ceux qu’on peut assumer en plein jour. En effet, en guise de premiers soins, Amir parcourt la ville pour fournir en réalité de la drogue à des patients en souffrance.

Accompagnées d’une musique électronique mélancolique, les rondes nocturnes d’Amir servent de prétexte à un portrait de groupe d’une partie méconnue la société iranienne, celle habituellement reléguée aux marges : toxicomanes, prostituées trans mais aussi mères conservatrices pleines de contradictions. C’est un visage du pays qu’on a peu l’habitude de voir dans le cinéma iranien, et dévoiler ce dernier n’a pas été chose facile pour le réalisateur Ali Ahmadzadeh. Critical Zone a en effet était tourné entièrement clandestinement avec une équipe très réduite, des acteurs non-professionnels et des caméras cachées. Ahmadzadeh a même refusé de montrer le film fini au comité de censure, faisant de son long métrage une authentique œuvre clandestine.

Face au courage qu’il a fallu au cinéaste pour monter un projet si risqué, les éventuelles réserves sur la forme de son film ne pèse sans doute pas bien lourd, mais cela n’empêche pas d’en faire mention. Les conditions de tournage donnent ici lieu à une atmosphère particulière : nocturne de A à Z, Critical Zone est un film étonnamment silencieux où le protagoniste passe beaucoup de temps seul (longtemps, la seule voix entendues est celle de son GPS) à rabâcher des gestes et des situations similaires. Ahmadzadeh a bénéficié d’une marge de manœuvre très réduite pour sa mise en scène, mais celle-ci ne vient pas toujours rééquilibrer un scénario relativement convenu à force de répétitions d’archétypes sur la figure du chevalier solitaire blessé mais digne (et en voiture bien sûr, Iran oblige). L’inattendu a ses limites.

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par Gregory Coutaut

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