Critique : Bye Bye Tibériade

Hiam Abbass a quitté son village palestinien pour réaliser son rêve de devenir actrice en Europe, laissant derrière elle sa mère, sa grand-mère et ses sept sœurs. Trente ans plus tard, sa fille Lina, réalisatrice, retourne avec elle sur les traces des lieux disparus et des mémoires dispersées de quatre générations de femmes palestiniennes.  dans la vie de femmes qui ont appris à tout quitter et à tout recommencer.

Bye Bye Tibériade
France, 2023
De Lina Soualem

Durée : 1h22

Sortie : 21/02/2024

Note :

LA TERRE OUTRAGÉE

Des montagnes et des frontières invisibles : c’est ce qu’on examine à travers la vitre d’une voiture au début de Bye Bye Tibériade. Ce paysage dessine une grande histoire collective, mais aussi une histoire intime que Lina Soualem raconte dans son nouveau documentaire. La cinéaste continue d’explorer les archives familiales après son premier long, Leur Algérie. Elle dépeint plusieurs générations de femmes sur une terre traumatisée : la Palestine. C’est un lien que la jeune cinéaste doit d’abord reconstruire, à l’image de cette langue non transmise, qu’elle comprend mais qu’elle ne sait pas lire.

Le lien passe par les images, des photos ressorties où elle se rend compte qu’elle ne ressemble à personne. Les images anciennes d’archives historiques laissent place à des images au caméscope, dans les années 90. Soualem tisse un lien sensible entre la mémoire collective et les souvenirs personnels. Caméra au poing, elle saisit ce qui risque de tomber dans l’oubli – pour certaines choses, il est déjà trop tard. L’objectif se resserre sur la mère de la réalisatrice, l’actrice franco-palestinienne Hiam Abbass, partie pour la France dans les années 80. Quelles peurs se cachent derrière les sourires ?

A travers le parcours de Hiam Abbass, Soualem évoque les lieux disparus et les mémoires dispersées. Quelle émotion peut étreindre dans des endroits retrouvés ? Même de retour, est-ce qu’on se retrouve vraiment ? Comment, au-delà du deuil d’une famille, peut-on faire le deuil d’un lieu, des origines ? Malgré son sujet éminemment dramatique et qui prend une plus grande ampleur encore aujourd’hui, le film ne se laisse pas écraser et réserve une place à la vie, à des discussions plus légères. Les photos sont accrochées, les souvenirs encore présents, la parole est vive dans ce portrait politique et personnel.

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par Nicolas Bardot

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