Critique : Animal

Sous le soleil brûlant d’une île grecque, les animateurs d’un hôtel all-inclusive menés par la charismatique Kalia se préparent pour la saison. Décors en carton-pâte, costumes pailletés et spectacles de danse envahissent la scène. À mesure que l’été avance, la pression augmente, les nuits s’enchaînent, et les démons de Kalia se réveillent. Lorsque les projecteurs s’allument, the show must go on… mais cela a-t-il toujours un sens pour elle ?

Animal
Grèce, 2023
De Sofia Exarchou

Durée : 1h56

Sortie : 17/01/2024

Note :

UN ÉTÉ COMME ÇA

Dans la première scène d’Animal, Kalia fait avec entrain son job d’animatrice de club vacances, tentant d’apprendre à danser langoureusement sur du Marvin Gaye à des touristes trop vieux ou écrasés de chaleur pour faire l’effort de se lever. Son enthousiasme n’a pas l’air factice (dans une autre scène, on la voit même poursuivre l’effort malgré une jambe blessée), mais il ne rencontre qu’un écho mollasson. Pour un peu, cette mise en place pourrait posséder des airs d’Ulrich Seidl, mais la réalisatrice grecque Sofia Exarchou (révélée avec Park il y a huit ans) préfère suivre rapidement sa propre piste.

Que ce soit entre les murs du dancing, sur la plage attenante ou parmi les logements réservés à l’écart pour le personnel, toute l’action d’Animal se déroule à l’intérieur de cette résidence hôtelière anonyme, ni spécialement luxueuse ni franchement minable, où le dj passe les même tubes que partout ailleurs. Pendant combien de temps ? Difficile à dire, un été entier, quelques jours, plusieurs années ? C’est là l’une des qualités du film : les jours ou plutôt les soirées se suivent et se ressemblent pour Kalia et ses collègues, entre sessions karaoké avec les touristes et fin de soirées avinées avec les bénévoles. Fatalement, Animal n’échappe pas aux répétitions tout au long de ses deux heures, mais au moins le film réussit-il à traduire l’ivresse d’une perte de repères estivale.

Kalia est la chef du groupe des animateurs mais c’est surtout la seule Grecque parmi ces garçons et filles venus de toute l’Europe, au même titre que les résidents. De la vraie Grèce, on ne verra rien de tout le film, et les personnages non plus. La métaphore politique d’un pays uniquement considéré comme le terrain de jeu du reste de l’Europe n’est pas inintéressante, mais reste en filigrane avant l’ultime dénouement. A ce titre, Animal est un drôle de film, dont les contours du sujet ne sont jamais évident à distinguer. C’est une qualité qui vient donner une intrigante aspérité à des scènes à priori banales (un regard échangé dans les vestiaires peut sous-entendre beaucoup de violence) mais c’est aussi l’une des origines du rythme franchement lancinant de ce lendemain de fête permanent. Sofia Exarchou sait injecter des subtilités bienvenues entre les lignes, mais l’épuisement de ces journées oisives se révèle un peu trop contagieux sur la longueur.

| Suivez Le Polyester sur Twitter, Facebook et Instagram ! |

par Gregory Coutaut

Partagez cet article