Critique : Alpha – The Right to Kill

Dans les quartiers pauvres de Manille, la lutte antidrogue fait rage. Un officier de police et un petit dealer devenu indic tentent coûte que coûte de faire tomber l’un des plus gros trafiquants de la ville, mettant en jeu leur réputation, la sécurité de leur famille… et leur vie.

Alpha – The Right to Kill
Philippines, 2018
De Brillante Mendoza

Durée : 1h34

Sortie : 17/04/2019

Note :

EN IMMERSION

Brillante Mendoza ne plaisante pas avec le réel. Fidèle aux paradigmes de sa méthode d’écriture habituelle (qu’il nomme avec humour le Found Story, comme une variation du Found Footage), c’est en se basant uniquement sur des anecdotes et histoires réelles qu’il a conçu Alpha the Right to Kill. Outre le style ultra-réaliste qu’on lui connait également à la mise en scène, le cinéaste a ici poussé le souci d’authenticité jusqu’à mélanger de véritables policiers philippins aux comédiens. La méthode porte ses fruits  : le résultat est une nouvelle fois d’une immersion sans pareil.

Immersion n’est pas un vain mot, tant on a ici à nouveau l’impression d’être plongé dans un bain bouillant. Les personnages de Brillante Mendoza ne sont pas du genre à se lamenter sur le bout de trottoir. Tout comme les grand-mères de Lola ou les mères courages de Ma’Rosa ou Thy Womb, les flics et les trafiquants d’Alpha n’ont pas le luxe de s’arrêter. Ça court, ça crie, ça plonge en pleine tempête, défie les éléments et ça défonce les portes comme on abattrait des montagnes. Dans les dix-huit mois ayant suivi l’élection de Duterte, il est estimé que son programme de guerre contre la drogue a fait entre 15 000 et 20 000 victimes. Le mot guerre n’est pas exagéré. La caméra de Mendoza se faufile partout et nous plonge avec virtuosité dans une chaos dont on sort secoué nous aussi.

Il manque sans doute à Alpha – The Righ to Kill la profondeur qu’ont les meilleurs mélos de Mendoza (qui d’ailleurs, ressemblent eux-même à des films d’action). Mais quel que soit le registre, Mendoza demeure avant tout un fin analyste des mécaniques de groupes – et ce, alors même qu’il passe paradoxalement davantage par le physique que par le psychologique. Qu’il s’agisse de liens familiaux ou de ceux d’une communauté, les interactions entre l’individu et le groupe sont toujours au cœur de ses films. Cela peut-être une famille qu’on essaie de sauver à bout de bras, ou bien un tissu social qui enferme comme une prison. Le plan d’ouverture d’Alpha sur une marche militaire ne trompe pas  : c’est ici un pays entier qu’on voit se battre et de débattre jusqu’au KO.

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par Nicolas Bardot

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