Dossier 2024 : les 20 meilleurs courts métrages de l’année

Suite de notre bilan de l’année ciné 2024 avec un focus spécial sur les meilleurs courts métrages de l’année. Nous parlons beaucoup de courts tout au long de l’année sur Le Polyester et de nombreux autres films auraient pu figurer dans ce best-of. Voici nos 20 coups de cœur finalistes !



• Al sol, lejos del centro | Luciana Merino & Pascal Viveros (Chili)
L’histoire : Santiago, dans la chaleur de l’été. Une caméra balaie un voisinage apparemment sans histoire…
Pourquoi on l’aime : Présenté en compétition à la Berlinale, Al sol, lejos del centro était pour nous l’un des sommets du festival. A partir d’un dispositif qui évoque la caméra mystérieuse du Grand mouvement, Luciana Merino & Pascal Viveros filment un lieu avec une lenteur silencieuse qui invite un sentiment d’étrangeté. Qui regarde et où allons-nous ? L’expérience de Al sol, lejos del centro est ensorcelante et émouvante.



• Chime | Kiyoshi Kurosawa (Japon)
L’histoire : Matsuoka enseigne dans une école de cuisine. Un jour, l’un de ses élèves déclare entendre un bruit étrange, comme un carillon que lui seul semble percevoir…
Pourquoi on l’aime : Kiyoshi Kurosawa signe son formidable retour à l’horreur avec ce moyen métrage présenté à Berlinale Special. Dans Chime, la mise en scène minutieuse de l’horreur (sa construction, sa progression et son surgissement) pourrait être enseignée en école de cinéma et constitue l’une des meilleures vues au festival cette année. Les mouvements de caméra et le découpage sont d’une pureté limpide et glaçante.



• Extremely Short | Kōji Yamamura (Japon)
L’histoire : Entre calligraphie, embryologie et paroles d’outre-tombe, un poème convulsif qui s’enroule autour de la syllabe « da » en japonais – un souffle qui peut être le premier ou le dernier.
Pourquoi on l’aime : Extrêmement court en effet, puisque cette vignette animée et sélectionnée à la Quinzaine ne dure que 5 petites minutes, générique inclus. C’est pourtant l’existence entière qui bouillonne dans ce soubresaut à la fois primitif et surréaliste. Le Japonais Kōji Yamamura signe un film étonnant dont la tension est aussi insensée qu’existentielle.



• Flatastic | Alice Saey (France)
L’histoire : Poussées dans leurs derniers retranchements, les raies manta prennent le contrôle de la Terre. L’instauration de la nouvelle ère Raie passera par l’aplatissement systématique de chaque surface et de chaque objet. Y compris des humains.
Pourquoi on l’aime : Sélectionnée à Rotterdam, Alice Saey signe un court métrage d’animation étonnant, où la violence est pastel et où les tonalités contraires se rencontrent dans un univers imprévisible. Le monde formaté et aliénant de Flatastic est rempli de couleurs ravissantes où chaque mouvement prend une dimension chorégraphique. Derrière ces séduisantes apparences se cache une réalité plus inquiétante, même si celle-ci s’exprime par la fantaisie et l’absurde.



• Grandmamauntsistercat | Zuza Banasińska (Pays-Bas)
L’histoire : Une réinvention de la figure de Baba Yaga, la sorcière slave classique, à partir d’images d’archives du Studio de cinéma éducatif polonais.
Pourquoi on l’aime : Dès son titre, le court métrage de Zuza Banasińska (doublement sélectionné à Rotterdam et la Berlinale) propose une énigme. Drôle, ludique et déroutant, Grandmamauntsistercat propose un flux d’images habitées par un malaise surréaliste et grinçant. Avec un talent prometteur, Banasińska réussit ce paradoxe : faire un film fantastique à partir de films d’archives. Le texte dit dans cet ovni ensorcelant ne serait-il pas une formule magique de Baba Yaga ?



• Kawauso | Akihito Izuhara (Japon)
L’histoire : Une jeune fille marche dans les hautes herbes. Une loutre la rattrape et la rejoint dans sa promenade. Les deux tentent en vain de communiquer l’un avec l’autre.
Pourquoi on l’aime : Une loutre face à l’apocalypse, une flânerie silencieuse qui se transforme en chant d’adieu, une animation très finement crayonnée mais à la densité de détails étourdissante… En entrechoquant les échelles comme des plaques tectoniques, le magnifique Kawauso, dévoilé à Rotterdam, tisse un puissant crescendo onirique en noir et blanc.



• The Masked Monster | Park Syeyoung (Corée du Sud)
L’histoire : Tenaillée par la faim, une fillette échange son frère contre un sac de riz. Une fois rassasiée, elle reprend ses esprits. Mais il est déjà trop tard.
Pourquoi on l’aime : Dans un noir et blanc à la fois anxiogène et flamboyant, les rouages d’une machinerie violente s’enchainent avec furie autour des innocents protagonistes. L’horreur expérimentale du Coréen Syeyoung Park, sélectionné à Locarno, prend un virage narratif et trouve son écrin idéal dans ce format court, offrant un déluge intense d’idées visuelles et d’effets malaisants qui sait s’arrêter avant le trop-plein.



 The Nature of Dogs | Pom Bunsermvicha (Thaïlande)
L’histoire : Une famille de quatre personnes arrive dans un hôtel du bord de mer. De banales vacances se transforment en une série d’interactions qui trahissent une tension non dite. Le lendemain, dans une grotte abritant des statues de Bouddha, la situation se complique.
Pourquoi on l’aime : On avait déjà pu remarquer Pom Bunsermvicha avec son beau court métrage Lemongrass Girl ; The Nature of Dogs confirme ses grandes qualités. Dévoilé à Locarno, le film débute comme une chronique familiale assez triviale, avant de prendre une dimension spirituelle en un envoûtant basculement. Mais existe t-il vraiment une bascule dans ce monde où le réel et le mystique cohabitent ? La mise en scène élégante et pudique de Bunsermvicha fait merveille dans cette parenthèse poétique.



• On the Impossibility of an Homage | Xandra Popescu (Roumanie)
L’histoire : Qui est responsable d’un portrait, le peintre ou le sujet ? Ion a été une rockstar de la danse classique de la Roumanie communiste. Lorsque la perspective de lui consacrer un film est évoquée, il est fou de joie. Il a tant rêvé que cela arrive un jour.
Pourquoi on l’aime : L’hommage au danseur Ion Tugearu, comme le suggère le titre du film, est-il impossible ? Comment rendre justice au personnage plus grand que nature que la caméra observe, et à la grande Histoire que son destin éclaire ? C’est par son point de vue, ses ellipses et son travail sur les échelles que le film se distingue. Sélectionnée à Locarno, Xandra Popescu compose avec talent un anti-biopic, un ambitieux film de poche et un documentaire hors des conventions.



• Peeper | Han Changlok (Corée du Sud)
L’histoire : Une femme va à la rencontre d’un cinéaste qu’elle admire. Elle lui confie une histoire qui pourrait être le point de départ d’un film.
Pourquoi on l’aime : A partir d’éléments minimalistes (deux personnages, une discussion), le jeune Coréen Han Changlok délivre une leçon de mise en scène doublée d’une leçon d’écriture. Le cadrage et le montage aiguisés de Peeper (sélectionné à Rotterdam) nous plongent immédiatement dans ce récit secret. C’est un film sur la narration et son pouvoir, exécuté avec une impressionnante maîtrise toute coréenne. Vite, la suite !



• Preoperational Model | Philip Ullman (Pays-Bas)
L’histoire : La princesse Sophie et sa servante Jessica se préparent pour une nouvelle journée à la cour. L’angoisse de Sophie face à son avenir vient soudain bouleverser la hiérarchies et la chronologie de leurs vies.
Pourquoi on l’aime : Ça commence comme un conte enfantin avec des créatures anthropomorphiques au design un peu bizarre, avant de basculer dans un récit méta et mélancolique sur des histoires sans fin ni issues de secours. En n’utilisant rien d’autre que des images de synthèses, Philip Ullman, originaire de Suède, parvient à assembler un mini-puzzle vertigineux sur la solitude humaine. Cette rêverie animée réussit d’ailleurs le rare doublon d’être doublement sélectionnée à Rotterdam et à la Berlinale.



• Shé (Snake) | Renee Zhan (Royaume-Uni)
L’histoire : Sous la pression suscitée par l’arrivée d’une nouvelle rivale, les peurs et le désir d’excellence d’une jeune violoniste sino-britannique prennent la forme d’une créature monstrueuse.
Pourquoi on l’aime : A l’aise avec le mélange de genres et de tons, Zhan fait rencontrer body horror et farce, dans un film (remarqué à Neuchâtel) où le cauchemar peut aussi être un terrain d’émancipation. La cinéaste déjoue finement les clichés misogynes de la rivalité féminine ; l’horreur attendue (et la cinéaste sait y faire avec des visions puissantes et une riche bestiaire grotesque) donne finalement lieu à un chaleureux récit de sororité, qui encourage ses héroïnes – et son public – à jouer leur propre musique.



• Slow Shift | Shambhavi Kaul (Inde)
L’histoire : Dans la ville indienne de Hampi, une journée sereine au milieu des ruines antiques s’avance paresseusement, tandis qu’une meute de singes sacrés vaque à ses occupations.
Pourquoi on l’aime : Dans des paysages solaires et endormis, où des ruines de palais se confondent aux roches éternelles, aucune présence humaine. Seuls quelques singes semblent régner sur ces terres coupées du monde. A l’aide de seulement quelques bricolages (une touche de stop motion), et d’un art poétique du montage, la cinéaste indienne, sélectionnée à Karlovy Vary, fait cohabiter les échelles avec vertige et bâtit une science fiction de poche évoquant à la fois La Planète des singes que l’introduction de 2001 : L’odyssée de l’espace.



• Soleil gris | Camille Monnier (France)
L’histoire : La piscine est vide, le soleil tape, la tension monte : l’apocalypse écologique annoncée sur les ondes fait soudain irruption dans la réalité.
Pourquoi on l’aime : Ce superbe court métrage d’animation dévoilé à Locarno se distingue par une animation intelligemment dépouillée et expressive, ainsi qu’un remarquable sens du détail, du découpage et des dialogues. Le teen-movie mélancolique et la fable apocalyptique se rencontrent sous l’œil aiguisé d’une cinéaste prometteuse qui sait raconter et émouvoir avec quelques mots, quelques couleurs, quelques traits.



• Such Miracles Do Happen | Barbara Rupik (Pologne)
L’histoire : « Ils marchent sans aucun muscle, alors qu’ils ne devraient pas pouvoir marcher. Tissu de pierre. Comme c’est étrange » dit la petite fille tout en regardant son corps désossé.
Pourquoi on l’aime : Notre coup de cœur parmi les découvertes faites au Festival Premiers Plans d’Angers. Issue de la prestigieuse école de cinéma de Łódź, la Polonaise Barbara Rupik signe un stupéfiant cauchemar enfantin, à l’animation particulièrement étonnante – comme si ses figurines en volume étaient en train de fondre sous nos yeux. 14 minutes qui laissent bouche bée.



• Supersilly | Veronica Martiradonna (France)
L’histoire : Apres avoir pénétré à l’intérieur d’une tente, une petite fille en ressort effrayée, grandie et étrangement revêtue d’un costume de lapin. Dans ce voyage intérieur, cette jeune femme va tenter de comprendre le drame originel qui cause les souffrances qu’elle endure.
Pourquoi on l’aime : Avec son crayonné délibérément intense, des personnages vaguement humains mais trop souriants pour être honnêtes, ce dessin animé faussement enfantin possède un pied dans un cauchemar claustrophobe et l’autre dans une profonde tristesse, tout en nous mettant des couleurs explosives plein les yeux. Supersilly a fait sa première mondiale à la Semaine de la Critique.



• Toto | Klaudia Bochnik (Pologne)
L’histoire : Toto le tigre s’échappe du cirque local et crée la panique dans la région. Une jeune fille d’une ville voisine décide de sortir de chez elle malgré tout.
Pourquoi on l’aime : En six petites minutes quasi muettes, cet ambitieux court animé compose une mosaïque de pictogrammes qui transforment l’espace public en parcours du combattant pour son héroïne. L’imprévisibilité des formes fait de ce visionnage une perte de repères à la fois ludique et nerveuse, riche de niveaux de lecture. Remarqué tout récemment au Festival de Poitiers.



• Void | Yusuke Iwasaki (Japon)
L’histoire : Les camarades de classe d’Asagi ne semblent pas inquiètes lorsque Satake meurt subitement d’une manière étrange : elles continuent simplement leurs conversations sur la nourriture ou le karaoké. Alors qu’Asagi est confrontée à cette perte, tout ce qui l’entoure devient de plus en plus absurde.
Pourquoi on l’aime : C’est le chef d’œuvre de l’excellente sélection de courts métrages à Rotterdam. Le Japonais Yusuke Iwasaki investit les codes de la j-horror parmi les lycéennes tout en apportant une perspective neuve, qu’il s’agisse de sa mise en scène ou sa narration. Tout en ruptures sonores et rythmiques, Iwasaki invente son propre style dans cette indicible horreur au déroulement imprévisible. Le résultat est une sidération de 24 minutes.



• The Watchman | Ali Cherri (Italie)
L’histoire : Le sergent Bulut passe ses nuits dans une tour de guet à attendre un ennemi qui n’arrive pas, jusqu’à ce que d’étranges lumières apparaissent soudainement à l’horizon.
Pourquoi on l’aime : Remarqué notamment avec son long métrage Le Barrage qui fut sélectionné à la Quinzaine, l’artiste libanais Ali Cherri signe un court métrage fascinant entre vibration fantomatique et science-fiction. Que sont ces lumières et ces énigmes qui s’offrent au regard du protagoniste – et au nôtre ? Sélectionnée à Rotterdam, cette captivante bulle comme hors du monde déploie un généreux mystère et confirme le talent magnétique de son auteur.



• We Will Not Be the Last of Our Kind | Mili Pecherer (Israël)
L’histoire : Dans l’Arche de Noé, une jeune femme suit un programme de réinsertion professionnelle parmi les animaux.
Pourquoi on l’aime : Sélectionné en compétition à la Berlinale, We Will Not Be the Last of Our Kind est un drôle d’ovni qui mêle de manière très surprenante une tension apocalyptique et un sens de l’humour absurde. Dans la raideur des images de synthèse, une intrigante lumière semble sur le point de vaciller. Mili Pecherer signe un très étrange conte existentiel qui ne ressemble à aucun autre film et révèle une personnalité à suivre.


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Dossier réalisé par Nicolas Bardot et Gregory Coutaut le 10 décembre 2024.

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