Mois des Fiertés | Entretien avec La Briochée

Si vous cherchez une queen qui ne ressemble pas aux autres, allez voir La Briochée. Amoureuse du Japon, La Briochée met du flamboyant cosplay dans son drag. Et elle sait tout faire : chanter (en français et en japonais), jouer (La Briochée est également comédienne de doublage) ou dessiner des tenues extravagantes. Cette queen au riche imaginaire nous emmène loin, d’un bar de Paris vers une scène de Shinjuku. Elle est notre invitée du jour dans le cadre de notre dossier Mois des Fiertés.


Le cinéma est-il une source d’inspiration de ton drag ? Des icônes t’ont-elles servi de référence ? 

Je vais puiser mes inspirations et mon esthétique principalement dans l’univers de l’animation japonaise et de sa geek culture. J’ai un amour immodéré pour la scène artistique nippone que je ne saurais totalement retranscrire avec de simples mots. De ce fait, je me nourris inconsciemment des personnages féminins des films d’animations de Miyazaki qui sont toutes des représentations féminines très fortes. L’héroïne de Nausicaä de la vallée du vent, Dame Eboshi dans Princesse Mononoke sont des exemples parfait de femmes qui n’ont pas besoin d’hommes pour exister et je trouve que c’est si rare en termes de représentation dans le cinéma d’animation en général. Je suis également très friande du travail de Satoshi Kon comme Perfect Blue et Paprika dont le psychédélisme nourrit tout autant mon imaginaire. Mais si je dois sortir de l’animation, je dirais que j’ai une grande attirance pour les actrices hollywoodiennes des années 30 à 70. Betty Grable, Bette Davis, Dorothea Kent pour la moins connue. J’aime ce cinéma et le glamour féminin de cette époque. 

Si tu avais carte blanche, quel acteur ou quelle actrice de cinéma souhaiterais-tu relooker en drag queen ?

En drag queen, sans hésitation, je dirais Rossy De Palma. J’aime cette femme inconditionnellement. Son tempérament, son talent, sa voix, ce qu’elle dégage, sa beauté atypique ! Et j’adorerais l’emmener dans mon univers de poupée japonaise gothique lolita avec une tonne de froufrous, de grosses anglaises, pour casser avec elle l’image lisse que l’on a de cette mode. Ensuite, je mourrais d’envie de transformer Saoirse Ronan en drag king. C’est ma nouvelle actrice chouchou qui représente à merveille le nouveau dynamisme des jeunes acteurs et actrices prometteurs.euses. Je suis tombée amoureuse d’elle dans Les Filles du Docteur March de Greta Gerwig, lorsqu’elle se coupe les cheveux très courts pour les revendre. J’y ai vu un potentiel de king victorien, un peu dandy steampunk à tomber ! 

Y a t-il un film dans lequel tu aurais rêvé de jouer en drag ? 

Un film dans lequel j’aurais adoré tourné, ce serait Les Aventures extraordinaires d’Adèle Blanc-Sec de Luc Besson. Je ne suis pas fan du cinéma de ce monsieur mais j’adore la période de la Belle époque en France. Et le film est suffisamment déluré pour que l’on puisse y imaginer une super copine de l’héroïne drag-queen et très extravagante en tant que sidekick dans ses aventures. Sinon, dans un genre plus sérieux, j’aurais adoré tourner dans le film Studio 54 de Mark Cristopher. J’aurais adoré y jouer un rôle sulfureux de drag queen qui n’a pas peur de s’amuser aux dépends de sa vie. Revivre le temps d’un film un lieu aussi emblématique m’aurait énormément plu. Être actrice, c’est quelque chose que je souhaite faire dans ma vie. Et j’ai déjà eu la chance de tourner un petit rôle dans un long métrage en novembre où j’interprète mon propre personnage drag, MyëVe Märchen, justement. C’était une merveilleuse expérience que j’espère pouvoir réitérer. 

En quoi ton drag est-il politique à tes yeux ? 

Mon drag est politique à mes yeux par le simple fait que je sois une femme transgenre, que je l’assume et le revendique à travers mon drag. C’est tellement important pour moi de faire comprendre que le drag appartient à tout le monde quel que soit son genre. Car, non, je n’ai pas moins de travail à fournir qu’un homme cisgenre parce que « je suis dopée aux hormones » comme a pu dire une drag queen bien trop connue. Et puis, il est important que les gens fassent la différence entre le drag et la transidentité et c’est encore bien trop flou pour beaucoup de gens qui ont tendance à confondre les deux. C’est pourquoi j’encourage toute personne trans s’étant trouvée grâce au drag (ou non d’ailleurs), à continuer de faire du drag ! Quel que soit le domaine, la visibilité des personnes trans n’est pas suffisante alors je suis fière de pouvoir y contribuer à mon petit niveau et je ne compte pas m’arrêter. 

Quel est ton film queer préféré ? 

Pour mon film queer préféré, on va revenir au Japon avec le film Tabou (Gohatto en japonais) de Nagisa Oshima. Le film nous plonge dans le Japon féodal pour y traiter d’un sujet extrêmement tabou (d’où le titre du film) : l’homosexualité chez les samouraï. Ryuhei Matsuda y incarne un jeune homme à la beauté androgyne glaçante qui va provoquer bien des émois parmi ses collègues masculins dont la vie est régie par l’honneur. Si j’aime ce film, c’est parce que la question de cette homosexualité taboue peut être reportée sur bien des domaines actuels où le virilisme et le machisme empêchent la progression et l’ouverture des mentalités. Je pense notamment au milieu sportif mais aussi au jeu vidéo à un niveau professionnel par exemple. Un homme aimant un autre homme n’a jamais été dévirilisant comme une femme aimant une femme n’a jamais été déféminisant. J’ai hâte du jour où les notions de genre dictées par la société seront abolies. Ce serait une liberté pour bien plus de monde que l’on ne pense, pas que pour les personnes LGBTQIA+. 

Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 29 mai 2020. Crédit photos : Angélique David-Quinton / Drag Me Up / Stéphane Derny / Ranobrac.

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