Critique : Viens je t’emmène

A Clermont-Ferrand, Médéric tombe amoureux d’Isadora, une prostituée de 50 ans, mais elle est mariée. Alors que le centre-ville est le théâtre d’une attaque terroriste, Selim, un jeune sans-abri se réfugie dans l’immeuble de Médéric provoquant une paranoïa collective. Tout se complique dans la vie de Médéric, tiraillé entre son empathie pour Sélim et son désir de vivre une liaison avec Isadora.

Viens je t’emmène
France, 2020
De Alain Guiraudie

Durée : 1h40

Sortie : 02/03/2022

Note :

SUPERFICIEL ET LÉGER

Le nouveau film d’Alain Guiraudie se déroule à Clermont-Ferrand, soit presque en plein milieu de la France. Le film raconte en quelque sorte deux récits, dont le protagoniste est le même homme : Médéric, un quasi-quadragénaire au physique de monsieur tout-le-monde. D’un côté, la ville de Clermont-Ferrand est victime d’un attentat terroriste et Médéric se demande si le jeune garçon arabe qui vient de s’installer clandestinement dans la cage d’escalier de son immeuble n’y serait pas pour quelque chose. De l’autre, Médéric a un coup de foudre irrésistible pour Isadora (Noémie Lvovsky, vêtue du manteau rouge le plus moche du monde), une prostituée un peu plus âgée que lui.

Les deux récits se superposent à vrai dire très rapidement, dans une de ces scènes à la fois sexy et bouffonnes dont Guiraudie a la recette. Dans un renversement des rôles, c’est Médéric qui donne un orgasme à Isadora et elle qui le paye en retour, tandis que leurs ébats burlesques sont interrompus par un flash spécial alarmiste à la télé. Autour de ces protagonistes vont peu à peu se greffer divers personnages secondaires hauts en couleur, plus ou moins résidents du même immeuble. C’est comme si, tout en prenant une unité de lieu de plus en plus restreinte (une ville, puis un quartier, un appartement), Guiraudie voulait faire une cartographie de ce qu’est la France aujourd’hui : sa paranoïa, son racisme, mais aussi sa solidarité.

Ce n’est pourtant pas exactement à la France de 2022 qu’on pense devant Viens je t’emmène. Prostituée au grand cœur, petite frappe sensible, voisins anars à la gâchette facile…. Ce tableau de famille rappelle plutôt un certain cinéma populaire des années 80, gentiment provoc et un peu dépassé. Alourdi par ces archétypes d’un autre temps, le discours politique contemporain de Guiraudie a du mal à rester pertinent tout du long, mais est-ce réellement le but premier du film ? Entre utopie sexuelle, élans romanesques et film noir bouffon, plus Viens je t’emmène avance, moins on est bien certain de savoir là où il veut justement nous emmener. C’est peut-être autant une qualité qu’un défaut.

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par Gregory Coutaut

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