Critique : Vesper Chronicles

Dans le futur, les écosystèmes se sont effondrés. Parmi les survivants, quelques privilégiés se sont retranchés dans des citadelles coupées du monde, tandis que les autres tentent de subsister dans une nature devenue hostile à l’homme. Vivant dans les bois avec son père, la jeune Vesper rêve de s’offrir un autre avenir, grâce à ses talents de bio-hackeuse, hautement précieux dans ce monde où plus rien ne pousse. Le jour où un vaisseau en provenance des citadelles s’écrase avec à son bord une mystérieuse passagère, elle se dit que le destin frappe enfin à sa porte…

Vesper Chronicles
Lituanie, 2022
De Kristina Buozyte & Bruno Samper

Durée : 1h54

Sortie : 17/08/2022

Note :

LE BOIS DONT LES RÊVES SONT FAITS

On a découvert la réalisatrice lituanienne Kristina Buozyte avec son film Vanishing Waves qui remonte à il y a bientôt 10 ans. Cette pépite SF était co-scénarisée par le Français Bruno Samper ; cette fois-ci les deux cinéastes sont crédités pour la réalisation de ce nouveau long métrage très attendu : Vesper Chronicles. Dans leur précédente collaboration, Buozyte et Samper s’étaient débrouillés à merveille pour faire de la science-fiction spectaculaire tout en obéissant aux contraintes d’un budget léger. C’est à nouveau le cas de Vesper – et en précisant cela, on n’applaudit pas tant la prouesse budgétaire que l’inventivité à l’œuvre.

Le minimalisme dans Vesper est à peu près aussi convaincant que sur Vanishing Waves. La SF s’invite parfois par de simples détails comme le design imaginatif d’une tenue (le travail sur les costumes est remarquable) ; Buozyte, Samper et leur équipe ont l’œil et ce sens du détail fonctionne très bien pour constituer avec cohérence le monde fantastique de Vesper Chronicles. Les cinéastes citent les peintres flamands comme Vermeer ou Rembrandt pour l’utilisation de la lumière. Celle-ci est vibrante et dramatique, tandis que les couleurs sont utilisées avec talent : c’est la tache d’une robe bleue ou d’une lumière or déposée dans ce décor de bois et de boue.

Le casting est également l’une des clefs du succès de Vesper Chronicles, ses deux rôles principaux en tête. L’énergie androgyne de Raffiella Chapman (découverte dans Une merveilleuse histoire du temps ou Miss Peregrine et les Enfants particuliers) et le visage sans âge de Rosy McEwen apportent de la singularité à ce récit dont les motifs sont assez archétypaux. C’est assumé car, comme l’indiquent les cinéastes, le point de départ de Vesper Chronicles est celui d’un conte – on en rencontre ici les figures ou le décor.

Est-ce du rétro-futurisme ou tout simplement un futur épuisé ? Il ressort de Vesper une certaine tristesse étrange qui peut évoquer L’Histoire sans fin. Le jour ne semble jamais se lever vraiment et, à défaut de lumière, le film manque peut-être parfois de feu. Ça n’est pas, à nos yeux, un problème de rythme, davantage un problème de variations ou de relief narratif qui prive parfois le film de dynamisme. Mais il y a aussi dans Vesper Chronicles une stimulante humilité, une intelligence à relier le récit politique de SF à des problématiques actuelles, une générosité visuelle et organique qui font de ce film un séduisant voyage.

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par Nicolas Bardot

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