Festival de La Roche-sur-Yon | Critique : Users

À partir d’une expérience de la maternité, de l’imperfection de la mère et de l’indéfectible excellence de la machine, Natalia Almada envisage, sous forme d’essai dystopique, le futur de ses enfants dans un monde technologique.

Users
États-Unis, 2021
De Natalia Almada

Durée : 1h21

Sortie : –

Note :

TECHNOBOSS

Prix de la mise en scène au Festival de Sundance, Users est en effet un festin pour l’œil. Vu sur grand écran, le documentaire de la Mexicano-Américaine Natalia Almada est un voyage fascinant et immersif qui questionne nos rapports aux technologies. De l’araignée filmée en gros plan à l’immensité du ciel, Users effectue un intéressant travail sur les échelles. Car Almada questionne aussi notre regard : il y a ce que le cadre dévoile et ce qu’il choisit de ne pas dévoiler immédiatement. Almada filme régulièrement des lignes qui traversent et (re)dessinent l’espace. Pour parler des technologies et de leur place dans nos vies, la cinéaste pointe le peu d’intérêt que l’on peut porter désormais à l’extraordinaire.

Ce n’est fort heureusement pas un commentaire de boomer et le long métrage évite judicieusement la lourdeur de l’oracle. Les interrogations dans Users sont intimes, à la première personne, et impliquent Natalia Almada elle-même. Ses enfants feront-ils la différence entre la machine qui peut les bercer et ses bras à elle ? Quelle est sa place de mère imparfaite par rapport à cette « mère parfaite » mais pourtant invisible ? « La technologie modifie non seulement le concret (les paysages) mais aussi l’abstrait (notre perception de l’espace et du temps) », commente-t-elle.

Il est beaucoup question de perception dans Users et c’est là qu’intervient le formidable travail formel de la cinéaste. Qu’est-ce que le cadre peut raconter, qu’est-ce qu’une juxtaposition d’images au montage peut faire ressentir ? De plongées en contre-plongées, Almada regarde son sujet dans tous les sens possibles. Ses images géométriques sont puissantes et évitent les clichés à la Yann Arthus Bertrand. C’est l’étrangeté de ces décors de science-fiction sans science-fiction, de cette pluie de circuits électroniques filmés comme des Boyards qui tombent. Son regard est précieux, il invite ici le nôtre à regarder de plus près l’insolite devenu quotidien, l’ambivalence d’un réel parfait et anxiogène. A l’image du double-sens du titre, désignant autant l’utilisateur d’une technologie qu’un consommateur de drogue.

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par Nicolas Bardot

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