Critique : Lost in the Night

Dans une petite ville du Mexique, Emiliano recherche les responsables de la disparition de sa mère. Activiste écologiste, elle s’opposait à l’industrie minière locale. Ne recevant aucune aide de la police ou du système judiciaire, ses recherches le mènent à la riche famille Aldama.

Lost in the Night
Mexique, 2023
De Amat Escalante

Durée : 2h00

Sortie : 04/10/2023

Note :

LE SOUS-SOL DE LA PEUR

La filmographie du cinéaste mexicain Amat Escalante avait pris un virage aussi inattendu qu’excitant en 2016 avec l’inclassable La Région sauvage. Si ses premiers films faisaient une peinture réaliste, bien que percée d’éclats de très grande violence, de la conditions de vie des travailleurs pauvres, La Région sauvage plongeait la tête la première dans un fantastique à la fois sexuel et monstrueux, comme si le cinéaste avait ouvert d’un grand coup l’horizon de son imagination – et la nôtre avec. Lost in the Night (perdus dans la nuit) a beau posséder un titre évoquant presque la science-fiction, il s’agit plutôt d’un retour aux sources pour Escalante.

La parenthèse horrifique semble refermée, mais l’est-elle réellement ? Le jeune protagoniste se retrouve engagé comme homme de main dans la demeure chic d’une célèbre actrice qu’il soupçonne d’être liée, avec sa brute de mari, à la disparition de sa mère il y a quelques années, alors que cette dernière luttait aux côtés des mineurs locaux. Le scénario à suspens de cette enquête dans une demeure pleine de secrets et faux-semblants a beau demeurer réaliste, il n’arrête pas de faire des clins d’œil au film de genre. Il plane sur cette histoire de corruption le soupçon d’une secte, d’une invasion venue d’ailleurs, et d’un refoulé horrible prêt à remonter à la surface. Le temps d’une brève scène sous-marine, c’est même a l’Inferno d’Argento qui nous revient à l’esprit. Et puis après tout, Lost in the Night s’ouvre sur un écran rouge sang aveuglant.

Amat Escalante ne poursuit pas toutes ces pistes et c’est parfois frustrant, mais leur accumulation discrète donne néanmoins au long métrage davantage d’ampleur et d’ambition que les premiers films du cinéaste. Lost in the Night nous donne de faux indices mais nous garde aux aguets à coup de pulsions de morts. Un peu comme dans Robe of Gems (réalisé par l’ancienne monteuse d’Escalante, Natalia López Gallardo), on sent ici que la violence pourrait surgir sous n’importe quelle forme, de la plus tangible à la plus métaphorique. Autre pont commun entre les deux films, et pas des moindres : leur grande réussite plastique. Avec ses ciels immenses à perte de vue, son goût pour les sombres recoins et sa percutante palette de couleurs, Lost in the Night est un film noir qui régale l’œil.

| Suivez Le Polyester sur Twitter, Facebook et Instagram ! |

par Gregory Coutaut

Partagez cet article