Étrange Festival 2019 | Critique : Paradise Hills

Une jeune femme se réveille piégée sur une île bien étrange, sur laquelle tout paraît idyllique, et qui ressemble à une école préparant les jeunes filles en vue de leur mariage…

Paradise Hills
Espagne, 2019
De Alice Waddington

Durée : 1h35

Sortie : –

Note :

PORTRAIT DE LA JEUNE FILLE EN ROSE

Ce n’est pas tous les jours qu’on croise un premier long métrage qui sort autant de l’ordinaire que Paradise Hills, réalisé par l’Espagnole Alice Waddington. A une époque où le divertissement, notamment hollywoodien, doit volontiers être sérieux et badass, Waddington privilégie le kitsch et la fantaisie. Le film est à contre-temps, mais aussi parfaitement dans l’époque avec les thèmes qu’il aborde. La réalisatrice investit la fantasy SF pour en faire une rêverie féministe. C’est un conte où les jeunes femmes sont encouragées à être elles-mêmes dans une société qui les endort et veut en faire d’obéissantes poupées. Et le récit archétypal de jeune fille en détresse est twisté avec malice lorsqu’on observe ici une héroïne qui cherche à tout prix à éviter… de se marier.

Dans l’île merveilleuse de Paradise Hills, le rose est partout, les tissus sont vaporeux, les fleurs délicieuses. Waddington emprunte à l’esthétique du shōjo manga, et on a souvent le sentiment que ses héroïnes sortent d’une peinture de Fragonard pour se promener dans des bâtiments de Gaudi. La cinéaste a été costumière et photographe – cela se sent. Elle a l’œil, et la direction artistique est ici utilisée comme un outil narratif au même titre (voire davantage) que le scénario lui-même. Le sentiment de Paradise Hills naît en fait plus du ravissement formel que du déroulé du récit.

Le scénario, co-écrit par Nacho Vigalondo et Brian DeLeeuw à partir d’une histoire de Waddington, n’est pas tout à fait à la hauteur des ambitions de la réalisatrice. Les explications sont trop nombreuses, l’action bancale dans le dernier tiers. Le film se rattrape comme on l’a dit par sa réussite plastique, mais aussi par la générosité et le fun de sa dimension camp. Il y a aussi ici un très bon sens du casting, alliant rafraichissantes it girls (Awkwafina, Danielle Macdonald) et idées aussi incongrues que pertinentes (Milla Jovovich, Arnaud Valois). Ce tour de carrousel est délectable et on note le nom de Alice Waddington qui réussit ici ce qu’on attend d’un premier film : qu’il ne ressemble pas aux autres.

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par Nicolas Bardot

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