Festival de Turin | Critique : O trio em mi bemol

Jorge réalise une adaptation du Trio en mi bémol, l’unique pièce écrite par Eric Rohmer.

O trio em mi bemol
Portugal, 2022
De Rita Azevedo Gomes

Durée : 2h07

Sortie : –

Note :

DOUCE DOUCE MUSIQUE

A l’origine du nouveau film de la réalisatrice portugaise Rita Azevedo Gomes (La Vengeance d’une femme, A Portuguesa), il y a Le Trio en mi bémol, unique pièce de théâtre écrite par Eric Rohmer. La matériau d’origine est particulièrement économe puisqu’il s’agit d’une succession de sept dialogues entre deux protagonistes (et non pas trois, comme peut faire croire le titre), et ce film ne l’est pas beaucoup moins. La réalisatrice assume un minimalisme dans la mise en scène et la direction artistique, sans que l’on sache très bien ce qui relève du clin d’œil théâtral et ce qui est dû aux contraintes sanitaires.

Tourné par une troupe d’amis dans une maison de vacances, O trio em mi bemol est en effet né d’un désir spontané et collectif, comme un jeu ou une utopie. Cette dimension presque extra-filmique offre d’ailleurs comme un écho au Journal de Tûoa de Miguel Gomes et Maureen Fazendeiro. Il est d’ailleurs un peu redondant que la cinéaste rajoute à sa captation une mise en abyme. Ceux que l’on prend d’abord pour les protagonistes de la pièce de Rohmer se révèlent en effet rapidement être des acteurs répétant la pièce, sous la surveillance lointaine d’un metteur en scène facétieux qui les épie à travers des branchages (un gimmick qui évoque plus Resnais que Rohmer, pour le coup). Quand ce dernier explique avec moult malice à ses acteurs avoir perdu son scénario, pour enfin le retrouver à la toute fin, la poésie du film prend l’eau.

En toute humilité, on se demande un peu ce que Rita Azevedo Gomes a voulu apporter, avec cette drôle de mise à distance, au texte d’origine. Si la langue particulière de Rohmer reste un plaisir à entendre, celle-ci se retrouve par moment curieusement asséchée par ces nouveaux paradigmes de mise en scène. On craint par moments que O trio em mi bemol ne finisse paradoxalement par ressembler à l’image que se font de Rohmer les gens qui n’ont jamais vu ses films, mais c’est aussi de par sa sobriété jusqu’au-boutiste que le film devient quand même fort intrigant. A l’image de sa forme aux succès discrets (l’harmonie des couleurs, lignes inattendues venant habiter le cadre), c’est en sourdine que le film dévoile son charme simple.

| Suivez Le Polyester sur Twitter, Facebook et Instagram ! |

par Gregory Coutaut

Partagez cet article