Berlinale 2019 | Critique : Flatland

Deux jeunes filles en cavale à travers les paysages d’Afrique du sud, poursuivies par une policière sur la trace d’un meurtre.

Flatland
Afrique du sud, 2019
De Jenna Bass

Durée : 1h57

Sortie : –

Note : 

MÊME LES COWGIRLS ONT DU VAGUE A L’ÂME

Flatland, le plat pays, ce n’est pas ici le surnom de la Belgique mais celui d’une région d’Afrique du sud, supposée être tellement plate qu’on peut y voir « son destin débouler à l’horizon à toute vitesse ». Leur destin, les héroïnes de Flatland n’en ont pourtant que faire, surtout quand celui-ci est forgé d’avance pour elles par la société patriarcale qui les entoure. Les rôles bien classiques de jeune mariée obéissante ou de maman douceur , elles les envoient valser sans trop d’état d’âme. Celles qui déboulent à toute vitesse, ce sont elles.

On avait repéré la jeune réalisatrice Jenna Bass l’an dernier, déjà à la Berlinale, avec High Fantasy, un curieux premier film en forme de fable. Elle revient avec des visions encore plus farfelues en tête, et une même volonté : donner un grand coup de pied aux identités de genre et aux rôles impartis aux femmes par la société. Flatland s’ouvre sur le conte de fées d’une fête de mariage, pour mieux abattre à coups de revolver quelques instants plus tard. Une introduction bordélique mais malicieuse qui rappelle au passage celle de Beignets de tomates vertes, où l’image d’Épinal garçon-fille était presque immédiatement réduite en bouillie pour le bien de l’héroïne trop naïve. Ici aussi, la jeune demoiselle va être sauvée non pas par son mari, mais par une fille. Et s’il n’y a ici pas de sous-texte lesbien (les héroïnes sont demi-soeurs et tout le monde est hétéro), c’est bien ensemble qu’elles galoperont à dos d’étalon dans le soleil couchant.

D’une certaine manière, Flatland déboule lui aussi à toute vitesse, avec sa générosité et ses idées hautes en couleur. Or le film se prend parfois les pieds dans sa propre précipitation. Souvent, même. Un peu trop, sans doute. L’une des héroïnes est accro aux sitcoms sentimentales les plus artificielles ; or, Jenna Bass, en utilisant tantôt – et parfois en même temps – les codes du conte, du film noir, de la parabole politique ou de la comédie romantique, s’embourbe par moments dans une artificialité similaire, aboutissant à un résultat un peu étouffant.

Reste des détails camp irrésistibles (une commissaire nommée Beauty Cuba, des boucles rebelles et peroxydées rappelant Thelma, Louise et même Nomi Malone) et une jubilatoire féminisation des archétypes virils : ici le flic taiseux, le cowboy sur un fier destrier, le chevalier servant… sont tous des femmes.

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par Gregory Coutaut

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