Festival New Directors/New Films | Critique : Dreaming & Dying

Trois amis d’âge mûr se retrouvent pour la première fois depuis des années. Chacun d’entre eux se met à avouer des sentiments inexprimés, mais leurs vacances prennent un tour surprenant lorsque le spectre de leurs vies passées menace de refaire surface.

Dreaming & Dying
Singapour, 2023
De Nelson Yeo

Durée : 1h17

Sortie : –

Note :

TRIANGLE OF SADNESS

Trois connaissances se retrouvent après des années. Le ton est rapidement assez lunaire, les clopes vont s’allumer, l’alcool devrait en toute logique s’y mêler, la caméra zoome et dézoome… l’ombre magique de Hong Sangsoo plane sur les premiers moments de Dreaming & Dying. Le premier long métrage du Singapourien Nelson Yeo (lire notre entretien), présenté en compétition Cinéastes du présent au Festival de Locarno, s’en éloigne peu à peu, comme il s’éloigne à vrai dire de toute chose connue, de toute formule. Dreaming, effectivement, dans ce film à la structure aussi libre qu’un rêve.

Trois connaissances se retrouvent donc, devant une improbable statue d’index dressé. On croit déjà deviner le paysage de poche d’un village vacances, on voyagera pourtant à travers les dimensions. Tout semble familier, tout sera imprévisible. Dreaming & Dying a quelque chose de très modeste, mais aussi d’indéniablement ambitieux. Nelson Yeo manie les contrastes avec habileté, et c’est aussi l’un des moteurs comiques les plus efficaces du long métrage : on y croque dans une jolie et juteuse pastèque tout en énumérant les catastrophes mondiales, on enchaine les anecdotes tout en constatant les effets du dérèglement climatique. Le ton du film reste délicieusement déroutant.

Un poignant soleil couchant pointe à l’horizon ? Un protagoniste en profite pour dessiner une bite dans le sable de la plage. L’humeur de Dreaming & Dying parvient à être à la fois mélancolique et farceuse. On s’amuse, mais on s’excuse beaucoup. L’une parle seule à la plage, l’autre parle seul à la piscine. Qu’est-ce qui lie les protagonistes, qu’est-ce qui reste amèrement enfoui dans leur passé commun ? Quelle forme prennent leurs souvenirs à l’image ? Est-ce un ancien triangle amoureux, faut-il déceler ici une tension érotique ? Il y a ce que l’on voit dans Dreaming…, et ce qui est souterrain, comme ce merveilleux temple sous-marin qui se révèle lors d’une séquence hallucinée. Un voile émouvant semble déposé sur les images de ce drôle d’ovni au charme singulier.

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par Nicolas Bardot

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