Critique : Costa Brava, Lebanon

Liban, dans un futur proche. Soraya et Walid se sont construits une vie idyllique dans les montagnes, loin du désordre et de la pollution de Beyrouth. Dans ce havre de paix, trois générations coexistent en apparente harmonie : les deux filles – Rim 9 ans, Tala 17 ans – la grand-mère et les époux Badri. Tout va bien jusqu’au jour où Rim aperçoit des étrangers dans la vallée. La vie paisible de la famille est brutalement remise en question par l’installation d’une décharge prétendument écologique. Malgré la corruption ambiante qui rend leur combat sans espoir, les Badri font front. Ce chaos extérieur a bientôt des répercussions sur le cocon familial…

Costa Brava, Lebanon
Liban, 2021
De Mounia Akl

Durée : 1h46

Sortie : 27/07/2022

Note :

HAVRE DE GUERRE

En dépit de son titre en forme de slogan touristique, on ne peut pas dire que Costa Brava, Lebanon fasse un portrait hagiographique du Liban. Les tout premiers plans suivent d’ailleurs le trajet de quelques gravas transportés à travers un labyrinthe d’autres gravas. Le film se déroule dans un futur proche, et les rares images de paysages urbains y ressemblent moins à un chantier en devenir qu’à des ruines. Le premier film de la réalisatrice Mounia Aki ressemble en effet moins à un bond dans l’avenir qu’à une ronde douce-amère coincée dans le passée

La famille Badri a choisi de quitter la ville pour s’installer dans ce qui est décrit comme « le dernier bout de verdure du pays ». Cette maisonnée pourrait être un havre de paix, mais les feuilles des arbres sont tout de même un peu trop jaunes au goût de maman. Maison de vacances pleine de feuilles mortes, où les travaux d’entretien semblent ne jamais devoir finir, le décor de Costa Brava, Lebanon est une riche métaphore. Cette famille a perdu de sa superbe et de son confort dans le dépaysement et a dû réapprendre à se serrer les coudes. Ils disent avoir oublié à quoi peut bien ressembler le président, mais les parois de cette bulle hors du monde sont plus étanches qu’ils ne l’espèrent. Elles éclatent pour de bon lorsque le gouvernement décide de construire une décharge presque sous leurs fenêtres. Le paysage entier se transforme alors en chantier chaotique, l’air devient difficilement respirable dedans comme dehors.

Ce que filme Mounia Aki, c’est moins la désintégration d’une famille que celle d’une région entière, et il n’est pas anodin que les rôles principaux soient tenus par Nadine Labaki et le Palestinien Saleh Bakri (Wajib). Costa Brava, Lebanon n’y va pas toujours de main morte avec les allégories, mais il est aussi traversé de doux éclats poétiques qui rappellent les songes d’Alice Rohrwacher, comme lorsque maman rêve que la maison se met à rouler comme un wagon de train. Le résultat est un attachant portrait, à la fois désabusé et lumineux.

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par Gregory Coutaut

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