Berlinale | Critique : Brother in Every Inch

Mitya et Andrey, deux frères jumeaux, suivent ensemble une formation pour devenir pilotes d’avions militaires. Ils veillent l’un sur l’autre dans toutes les situations, mais couper le cordon devient un défi.

Brother in Every Inch
Russie, 2022
De Alexander Zolotukhin

Durée : 1h20

Sortie : –

Note :

EXTRÊME LIMITE

Ce pourrait être le décor d’un nouveau Top Gun, ou bien celui de ces spots de pub pour chewing gum qui, dans les années 80, chantaient le sentiment exaltant d’être un gagnant aux commandes d’un puissant avion de chasse. Cela semble un peu naïf, mais il y a bel et bien de cette naïveté dans la description du monde à part que l’on voit dans Brother in Every Inch : une base militaire, des avions qui transpercent le ciel et des jeunes garçons qui apprennent à les piloter.

Peut-être devraient-ils d’abord apprendre à piloter leurs émotions ? Si la reconstitution par le Russe Alexander Zolotukhin (lui-même fils d’un pilote dans l’armée de l’air) est minutieuse, les avions apparaissent peu à peu comme un étrange prétexte dans Brother in Every Inch. On y parle d’une fraternité fusionnelle, et les problématiques abordées par le film pourraient être explorées dans bien d’autres contextes. Mais l’ivresse des hauteurs et la sensation de danger procurées par les vols parlent aussi de ce que les protagonistes ont en eux.

Si le traitement choisi par Zolotukhin a quelque chose de réaliste, il laisse néanmoins une place à une intrigante bizarrerie. Le récit minimaliste de ces deux frères prend une dimension quasi-mythologique. Ces entraînements parfois absurdes dans un no man’s land évoquent de temps à autre le spectre de Beau travail de Claire Denis. Il y a dans le film une tension homoérotique, sans qu’on ne sache si celle-ci est volontaire : ces tas de gars qui s’empilent et se désapent sans y penser, dans un film rempli de motifs virils mais qui paradoxalement donne l’impression de raconter une histoire d’enfants.

Et ces enfants, un jour, devront couper le cordon, comme celui qui relie les deux jeunes héros. Brother in Every Inch, par sa concision et son absence de psychologisation, laisse des vides – mais ses pointillés stimulent plus qu’ils ne frustrent. Le réalisateur, découvert avec le prometteur A Russian Youth, confirme qu’il est un talent sur lequel il faudra compter.

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par Nicolas Bardot

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