Festival de La Roche-Sur-Yon | Critique : Blaze

Sous le choc depuis qu’elle a été témoin d’une agression, la jeune Blaze peine à s’exprimer et préfère se réfugier dans son monde imaginaire. Là, le dragon qui l’accompagne depuis l’enfance va lui apprendre à dompter et extérioriser sa colère.

Blaze
Australie, 2022
De Del Kathryn Barton

Durée : 1h41

Sortie : –

Note :

DRAGON PILOTE

Blaze est le premier long métrage réalisé par l’artiste peintre australienne Del Kathryn Barton mais il ne s’agit pas pour autant de sa première réalisation. Son premier court métrage The Nightingale and the Rose (un film d’animation doublé par Mia Wasikowska) fut présenté à la Berlinale en 2015, et en 2017 elle dirigea Cate Blanchett dans le court Red. Exposées dans le monde entier (et présentes dans la toute première scène de Blaze, comme un clin d’œil), les peintures de Barton sont des portrait féminins intimes et grandioses, aux couleurs psychédéliques et aux traits inquiétants, situés quelques part entre l’enfance, la magie et la sauvagerie. Rien d’étonnant à ce que l’on puisse utiliser une formule similaire pour aujourd’hui décrire son étonnant film.

Blaze est le prénom de l’héroïne éponyme, encore aux portes de l’adolescence. C’est aussi un mot anglais évoquant les flammes. Ce brasier, c’est celui qui va naître en elle après avoir été l’unique témoin d’une agression sexuelle dans une ruelle. La scène est un choc pour Blaze, et Barton s’en sort bien au moment de mettre les points sur les i en filmant effectivement le crime. Ce n’est pourtant pas le secret ou même la culpabilité qui va consumer la jeune fille (le coupable est d’ailleurs identifié et jugé assez rapidement). Ce n’est pas quelque chose de l’ordre de l’intime. Le feu qui nait en elle vient d’un problème collectif : celui de l’injustice de l’impunité, celui de la cruauté de la culture du viol.

En débutant comme une sorte de rape and revenge placé (pour une fois) du coté d’une femme témoin, pour finalement suivre la voix d’un récit d’apprentissage adolescent, Blaze mélange à sa manière deux registres qu’on n’imaginait pas du tout se marier harmonieusement, avec la colère comme fil rouge. Et ce n’est pas l’unique grand écart ici à l’œuvre : tout en restant accessible à un public de l’âge de son héroïne, Blaze est un film qui parle de choses dures et brutales mais c’est aussi et avant tout un film à la direction artistique chatoyante et enchantée loin des faits divers glauques.

Le brasier du titre, c’est aussi celui propre à l’ami imaginaire de Blaze, un dragon domestique dormant paisiblement dans sa chambre. Or celui-ci ressemble moins à un froid reptile qu’à une créature rose toute en fanfreluches explosives et bizarres, sortie d’un carnaval sud-américain. Le côté imprévu de ces costumes et décors qui débordent violemment du réalisme se retrouve dans la mise en scène de Barton qui peut passer de scènes terre-à-terre (les dialogues entre Blaze et son père sont parfois trop explicatifs) à des coups de folie mélangeant stop motion, effets spéciaux, musiques et images qui se transforment en un souffle. Immersif comme s’il faisait appel à plusieurs sens à la fois, le résultat est une invitation à faire confiance à la puissance créatrice et destructrice de son imagination.

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par Gregory Coutaut

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