Entrevues Belfort | Critique : Victoria

Lashay T. Warren, un jeune homme de 25 ans, abandonne Los Angeles et un passé tumultueux pour tenter de se construire une nouvelle vie dans la ville inachevée de California City, en plein cœur du désert Mojave.

Victoria
Belgique, 2020
De Sofie Benoot, Isabelle Tollenaere & Liesbeth De Ceulaer

Durée : 1h11

Sortie : –

Note :

CITÉ PERDUE

Les premiers plans de Victoria pourraient sortir d’une comédie sur le patelin le plus ennuyeux de la planète : ce sont des images de tumbleweed roulant dans un lieu quasi-désert. L’un des protagonistes a une autre référence et cite Fievel au Far-West – rien d’un fier western en tout cas. Les Belges Sofie Benoot, Isabelle Tollenaere et Lisbeth De Ceulaer racontent une histoire assez lunaire et incroyable : celle d’une ville fondée il y a quelques décennies, mais qui ressemble à une anomalie sur la carte. Un peu comme si son concepteur avait entamé une partie de Sim City avant de changer d’avis et de prendre la poudre d’escampette.

Ce n’est pourtant pas totalement une ville fantôme que les cinéastes filment, puisque des gens y vivent toujours. On quadrille la ville sur Google Earth, elle est bien là sous nos yeux, mais elle n’est pas finie, à moitié vide, avec des maisons étrangement éloignées les unes des autres. L’envahissant désert n’a probablement pas changé depuis l’époque des pionniers, « eux-mêmes devaient le détester » entend-on.

Une question est posée à l’un des intervenants : « es-tu insatisfait des choses telles qu’elles sont ? ». Le temps de réflexion qu’il prend est déjà une réponse. Benoot, Tollenaere et De Ceulaer filment quelques jeunes gens afro-américains, comme s’ils vivaient ici à la marge de la marge. « Fuck Donald Trump » lance l’un d’eux, et d’un coup nous sommes ramenés au présent et au monde. Un arc-en-ciel tombe sur ce lieu surréaliste. Un trou quelque part mène t-il à une autre galaxie, un univers alternatif ? Il y a quelque chose d’étrangement romanesque dans le décor filmé, et Victoria regarde la ville comme un lieu d’utopie. Le long métrage questionne assez finement l’appartenance et l’identité. Dans cette ville absente dont même le nom (California City) manque de personnalité, l’un des protagonistes écrit son nom à lui sur des pierres comme il signerait un manifeste.

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par Nicolas Bardot

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