Festival Visions du Réel | Critique : Apple Cider Vinegar

Quel est le point commun entre un calcul rénal, un volcan du Cap-Vert et un géologue anglais ? C’est l’énigme proposée par Sofie Benoot dans cette géniale déambulation entre le minuscule et l’infini. Un film puzzle, quelque part entre documentaire animalier et conte philosophique, qui fait parler pierres et phoques, nous interrogeant sur le lien entre le corps et la planète.

Apple Cider Vinegar
Belgique, 2024
De Sofie Benoot

Durée : 1h20

Sortie : –

Note :

LE MONDE DANS LA MAIN

La réalisatrice belge Sophie Benoot s’était faite remarquer il y a quatre ans en coréalisant Victoria, pour lequel elle plantait sa caméra dans l’étrange décor d’une ville quasi-fantôme de l’ouest américain. Sa caméra est cette fois-ci tournée dans la direction opposée, vers sa propre intimité. On pourrait presque dire vers son propre nombril puisque tout commence par un caillou tout rond et pâle qui s’avère un calcul rénal. Or, en partant de ce minuscule point de départ qui tient dans la paume de sa main, la réalisatrice offre un voyage dans les directions les plus lointaines et inattendues.

Sans se hisser à des sommets similaires (mais combien de documentaires peuvent s’en vanter ?), la démarche évoque celle de Patricio Guzman partant d’un banal objet de même taille pour raconter l’histoire et la géographie du Chili dans Le Bouton de nacre. Sophie Benoot n’a pas peur de lancer elle aussi des ponts poétiques audacieux entre les latitudes, les natures d’images et les sujets, passant par exemple de l’humble remède maison qui donne son titre au documentaire à la destinée politique des pierres taillées dans les mines à ciel ouvert en Palestine.

Inclassable, Apple Cider Vinegar donne ainsi l’impression de pouvoir aller partout, dans n’importe quelle direction. C’est une démarche généreuse où le sérieux n’empêche pas le ludisme, mais c’est aussi une source de frustration, comme si l’on était là face à un beau catalogue de géologie sans ligne éditoriale précise. Le film est parsemé d’images glanées par des live streams un peu partout dans le monde (et même dans l’espace), or ce voyage par delà les frontières nous est raconté avec la voix chaleureuse et domestique de Siân Phillips, célèbre narratrice de documentaires animaliers télévisées britannique. Tout comme le calcul rénal dont la formation possède une étonnante généalogie, le film nous donne effectivement par moment l’impression que l’immensité est à portée de main.

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par Gregory Coutaut

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