A voir en ligne | Critique : Zinder

Dans la ville de Zinder, au cœur du Sahel, des jeunes Nigériens s’organisent en gang face au manque de perspectives. Ces groupes, appelés « Palais », sont issus du quartier de Kara Kara, abritant historiquement lépreux et parias.

Zinder
Niger, 2021
De Aicha Macky

Durée : 1h22

Sortie : –

Note :

LES CICATRICES

A plusieurs reprises dans Zinder, la réalisatrice nigérienne Aïcha Macky (lire notre entretien) filme les cicatrices de ses interlocutrices et interlocuteurs. Des traces sur le front, le visage, le cou, les bras, chacune étant la marque d’une histoire violente. Cette cicatrice a été laissée par une machette, celle-là par un couteau, celle-ci par des chaînes, cette autre par un rasoir. C’est une énumération sinistre d’agressions subies et qui donne un aperçu de leur impact psychologique. Aïcha Macky filme à Zinder dont elle est originaire, et le long métrage se déroule à Kara Kara, un quartier historiquement habité par les lépreux et les marginaux.

Zinder débute par un plan sur un garçonnet avant qu’un mouvement de caméra ne saisisse une large perspective sur la ville. C’est une perspective à distance qui reviendra dans Zinder : une image en plongée, une autre montrant les lumières de la ville nocturne. Macky s’intéresse au lieu, à la frontière, à ceux qui y habitent et tentent de survivre. Elle filme des gaillards enchainant les exercices de musculation, et jouent des pectoraux dans des démonstrations de force un peu ridicules. Mais cette force physique est une armure face à une violence qui paraît quotidienne, quand au téléphone on regarde une lapidation, quand on cite la menace de Boko Haram, quand on rappelle l’histoire d’un viol punitif.

La caméra de Macky s’invite sur les routes et dans les rues, notamment la nuit. Des nuits profondes où les habitants ne sont plus que des silhouettes. Parmi celles-ci : des femmes. Si le long métrage interroge davantage de garçons, la cinéaste se penche aussi sur le sort encore moins enviable des femmes. La séquence la plus marquante du long métrage montre, de nuit, une succession de femmes dont on ne voit pas le visage. Elles sont silencieuses, et l’on ne distingue que la lumière de leurs cigarettes. Comme une rougeoyante pulsation, une respiration tranquille, droit devant nous et la caméra – elles sont là et ne disparaitront pas.


>> Zinder est à découvrir sur le replay d’Arte jusqu’au 27/03/2024

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par Nicolas Bardot

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