Festival de Busan | Critique : To Kill a Mongolian Horse

Au cœur des steppes hivernales, Saina s’occupe de son ranch pendant la journée et fait des numéros à cheval pour le public la nuit. Contrairement au majestueux cavalier qu’il incarne lors des spectacles, Saina découvre que sa vraie vie de berger est sur le point de se désintégrer.

To Kill a Mongolian Horse
Mongolie, 2024
De Xiaoxuan Jiang

Durée : 1h38

Sortie : –

Note :

ON ACHÈVE BIEN LES CHEVAUX

Xiaoxuan Jiang a été distinguée l’an passé au Festival de Busan avec son court métrage Graveyard of Horses. Ce film relatait les difficultés d’une mère, dans la steppe mongole hivernale. Le décor de son premier long métrage, To Kill a Mongolian Horse, est assez voisin. La steppe mongole s’étend à perte de vue, mais la réalisatrice n’en chante pas vraiment la beauté – les couleurs sont neutres, on patauge dans des flaques et de la gadoue. Ce décor du quotidien tranche nettement et de manière évidente avec les lumières léchées et dramatiques de la scène sur laquelle Saina se produit. Saina se prépare pour un spectacle et fait des numéros à cheval. On ne voit pas le public dans la salle et pour cause – le public, c’est nous.

Outre le contraste formel, Xiaoxuan Jiang dépeint le contraste dans la vie de Saina, formidable héros lors des représentations et laborieux travailleur dans la vie de tous les jours. L’héroïsme de la vraie vie est beaucoup moins clinquant que les mises en scènes réservées pour les touristes chinois. Saina se performe lui-même, transcendé en fier guerrier, tandis qu’en coulisses sa vie tombe en ruines. La cinéaste dit s’être librement inspirée de l’expérience réelle de son protagoniste. Son travail de tous les jours semble appartenir au passé, soumis à l’argent chinois, avec toute la violence systémique que cela implique – même exploité, « vous êtes chanceux qu’on vous propose de l’argent » lui lance t-on à la figure comme un crachat.

La caméra fixe de la réalisatrice dépeint un quotidien désormais figé. L’identité-même de Saina est muséifiée : il n’est plus là que pour le divertissement et la servitude. La quête désespérée de l’argent laisse littéralement des cicatrices dans la peau de cet homme blessé. Une surprenante vue panoramique depuis un drone détonne avec un décor rendu anachronique. Dans ce long métrage dévoilé à la Mostra de Venise dans la compétition à Giornate Degli Autori, le savoir-faire flirte parfois avec une approche un peu scolaire et appliquée, mais Xiaoxuan Jiang parvient à composer le touchant portrait d’un homme devenu une anomalie dans son propre décor.

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par Nicolas Bardot

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