Festival des 3 Continents | Critique : The Fable

Printemps 1989. Dans les hauteurs de l’Himalaya indien, où même les oiseaux volent bas pour éviter de se perdre dans les nuages, Dev possède un vaste domaine de plusieurs vergers et vit dans une maison de style colonial avec sa famille.

The Fable
Inde, 2024
De Raam Reddy

Durée : 1h59

Sortie : –

Note :

EN APESANTEUR

Le titre de ce film du cinéaste indien Raam Reddy nous prévient d’entrée de jeu : le récit qui va suivre possède la dimension d’un conte et va donc prendre ses libertés vis-à-vis du réel. La plupart des événements composant l’histoire qui nous est ici racontée sont pourtant très réalistes (et les quelques exceptions notables sont trop précieuses pour les dévoiler d’avance), mais cela n’empêche pas The Fable de ne ressembler à rien d’autre qu’à lui-même, une sorte de rêverie sérieuse en apesanteur. Par quelle formule le film atteint-il cet équilibre au réalisme magique? La réponse n’est pas évidente, mais cela tombe bien, Raam Reddy a davantage le goût des questions poétiques.

Tout débute dans un coin de paradis pourtant bien situé sur Terre : une maison au toit rose nichée au cœur d’un immense verger en escalier, tutoyant les sommets enneigés de l’Himalaya. Une terre de légendes, dit-on, mais aussi un terrain tangible dont le propriétaire doit s’occuper de façon organisée. Or la tâche est moins idyllique qu’il n’y parait car entre les relations tendues avec les travailleurs issus d’une autre caste, la police corrompue qui complique les problèmes avant de les régler, et la présence de moines au silence entêtant, la cohabitation se révèle compliquée au jardin d’Eden. Compliquée, ce n’est peut-être pas l’adjectif exact pour décrire la trame narrative de The Fable, mais ces histoires de menaces plus ou moins réelles ou fantasmées conservent jusqu’à la fin une opacité qui peut freiner.

C’est avant tout visuellement que The Fable brille. D’ailleurs beaucoup de choses brillent fort, ici : les étoiles dans le ciel immense, les lucioles dans le jardin (comme dans Rapture), et la lumière rosée d’un perpétuel soleil couchant de conte de fées. Tourné en pellicule, The Fable possède un grain très poétique donnant l’impression que ces précieuses images ont été tournées il y a des décennies et qu’on vient seulement de les retrouver dans une ancienne boîte à bijoux. La manière qu’a The Fable d’être toujours sur le point de nous révéler quelque chose pour toujours s’esquiver a de quoi frustrer. Comme les personnages du film, magie et réalisme cohabitent en chiens de faïence plus qu’ils ne se mélangent. Comme une séance d’hypnose, le film nous berce parfois trop mais nous donne également envie de nous immerger dans la découverte de son décor, à l’image du beau plan séquence placé en ouverture.

 

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par Gregory Coutaut

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