Berlinale | Critique : The Adults

De retour dans sa ville natale, Eric est confronté à ses deux sœurs, ses camarades de poker et son ancien amour.

The Adults
Etats-Unis, 2023
De Dustin Guy Defa

Durée : 1h31

Sortie : –

Note :

POKER FACE

Eric est de retour dans sa ville natale après s’être absenté pendant un temps suffisamment long pour que sa sœur le lui reproche avec amertume. Pourtant Eric a plutôt l’air d’avoir encore l’âge de partir en vacances en famille plutôt que d’avoir bourlingué pendant des décennies. Voyageur d’affaires (quelles affaires ?), Eric dit avoir l’habitude des chambres d’hôtel anonymes et de la solitude, alors même qu’il ne ressemble qu’à un grand ado de retour de colo. Le choix de confier ce rôle de fils de famille dysfonctionnelle à Michael Cera (vingt ans après Arrested Development) a sur le papier quelque chose de presque trop évident, mais outre que ce dernier délivre ici l’une de ses meilleures performances, son visage poupin colle parfaitement à l’état d’entre-deux du film.

Eric et ses deux sœurs sont les adultes du foyer depuis le décès de leur mère. Le temps d’un week-end plein de ressentiment et de souvenirs, ils cohabitent dans la maison familiale devenue trop grande et vieillotte pour leur âge. Aussi peu crédibles que des enfants qui se seraient grimpés sur les épaules pour se déguiser avec un imperméable de grande personne, tous trois ont des responsabilités d’adultes mais un sens des responsabilités encore adolescent, telle une tendance à prendre les décisions impulsives les plus idiotes ou une incapacité à communiquer avec empathie. C’est une source de gags, mais pas seulement. Bien utile pour lui permettre de gagner au poker, le visage impassible d’Eric cache un handicap en réalité plus amer.

The Adults ne cherche pas à révolutionner le terrain familier de la comédie indé américaine et sa limite est sans doute de ne jamais se débarrasser entièrement d’un certain sentiment de déjà vu. La recette est pourtant parfaitement effectuée (l’interprétation et la photo sont par exemple au-dessus de la moyenne) et le cinéaste Dustin Guy Defa fait même de la bavardise de ses protagonistes une intrigante pirouette : leur réflexe de continuer à se parler avec des voix de dessins animés comme quand ils étaient petits passe d’amusant à étrangement angoissant. C’est en effet dans ses variations de registre que The Adults étonne finalement le plus, abandonnant en cours de route son rire grinçant pour une jolie mélancolie, a l’image du passage à à l’âge adulte.

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par Gregory Coutaut

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