Critique : Mambar Pierrette

La ville de Douala trépigne à l’approche de la rentrée scolaire. Les clientes se bousculent pour que les vêtements des enfants et des cérémonies soient prêts à temps. Plus qu’une simple cou- turière, Pierrette est aussi la confidente de ses clientes et d’une génération. Mais de fortes pluies menacent d’inonder son atelier – un malheur parmi d’autres – Pierrette va devoir rester à flot.

Mambar Pierrette
Cameroun, 2023
De Rosine Mbakam

Durée : 1h33

Sortie : 31/01/2024

Note :

LA FEMME DEBOUT

La réalisatrice camerounaise Rosine Mbakam s’est fait connaître grâce à une œuvre documentaire centrée sur des femmes puissantes (Les Deux visages d’une femme ou encore Les Prières de Delphine, primé au festival Cinéma du réel). Mambar Pierrette, qui porte directement le nom de sa fière protagoniste, vient logiquement s’intégrer à cette galerie de portraits, et pourtant ce nouveau film est en réalité le premier travail de fiction de la cinéaste. Ce nouveau paradigme change-t-il tant de choses que ça à son talent d’observatrice ? Pas vraiment, car fiction et documentaire sont ici étroitement liés.

Rosine Mbakam filme le quotidien de Pierrette Mambar, une couturière inspirée par sa propre cousine Pierrette Aboheu, qui interprète par ailleurs le rôle. Peu importe si les anecdotes qui composent ce film touchant proviennent de la vraie vie de cette cousine ou bien de l’imagination de la cinéaste, car celle-ci fait preuve d’une délicatesse remarquable au moment de les mettre en scène. Tout est si crédible ici qu’on a tendance à oublier qu’on n’est pas face à de la pure captation, et seules quelques scènes où la reconstitution est visible (tel un braquage à moto) viennent nous le rappeler.

« Tu as l’air de porter tous les malheurs du Cameroun » dit-on à Pierrette, autour de qui les contrariétés plus ou moins grandes s’enchainent effectivement avec constance. Cela commence par une simple panne de machine à coudre pour finir sur l’image épique de Pierrette devant écoper son salon suite à une inondation, comme si c’était son quotidien tout entier qui menaçait de couler. Cet enchainement de poisses pourrait virer au sadisme, mais cette femme-là n’est pas du genre à se laisser abattre. Le talent de Rosine Mbakam se trouve dans le regard qu’elle pose sur son héroïne et qui parvient à rendre à cette dernière toute sa dignité, et son libre arbitre. A l’image de sa protagoniste, Mambar Pierrette est riche de nuances vivantes.

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par Gregory Coutaut

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