IDFA | Critique : Life is Beautiful

Alors que le jeune cinéaste palestinien Mohamed Jabaly se rend au Festival de Tromsø en 2014, les frontières de Gaza sont fermées pour une durée indéterminée. Jabaly ne peut pas rentrer, et sa demande de visa d’artiste en Norvège est rejetée. Il se retrouve apatride…

Life is Beautiful
Norvège, 2023
De Mohamed Jabaly

Durée : 1h30

Sortie : –

Note :

PAYS PERDU

Tout en haut du monde : c’est là que se rend le cinéaste Mohamed Jabaly, au Festival de Tromsø, une ville située au nord de la Norvège. Et tout au bord du monde : c’est là que va se retrouver le jeune réalisateur palestinien, victime d’une situation ubuesque. Les frontières de Gaza ont été fermées après son départ, tandis que Jabaly n’a pas l’autorisation de rester en Norvège. Mais où expulser quelqu’un dont le pays a ses frontières closes ? Life is Beautiful relate la bêtise de l’enfer administratif et des politiques racistes.

Le cinéaste palestinien a été remarqué en 2016 avec Ambulance. Inédit en France mais passé par de grands festivals documentaires (Sheffield Doc/Fest, IDFA, CPH:Dox), ce film se déroulait lors d’une nouvelle offensive israélienne à Gaza, à l’été 2014. Jabaly, à bord d’une ambulance, racontait le quotidien des victimes sur place, et au premier rang. Il y avait, dans ce long métrage, la nécessité de filmer pour comprendre. Sa situation dans Life is Beautiful est tout à fait autre : comment peut-on témoigner à distance, ou dans un no man’s land entre deux pays ? Lors d’une séquence en apparence légère mais aujourd’hui glaçante, Jabaly contacte tant bien que mal ses proches sur Skype, et ceux-ci sont difficilement visibles sur l’écran après une coupure d’électricité. « Tu ne nous vois pas, on dirait des fantômes », ricanent-ils.

Jabaly dépeint les réalités de l’exil : la solitude, le racisme au quotidien, la suspicion administrative, l’usure mentale. Dehors, c’est la nuit, tranquille ; et le jour, la neige rend tout paisible. Mais Jabaly mène un combat : le film est dans l’action plus que dans le mélodrame. Il y a de quoi, pourtant, se décourager parfois. Que devrait-il abandonner de son identité pour rester ? Si le film ne traite pas à proprement parler de la situation actuelle, ce qui se passe dans Life is Beautiful précède notre présent. Jabaly explique avoir à cœur de partager la beauté de Gaza, et ces images que l’on voit dans Life sont désormais très amères. Mais le titre est là pourtant, avec acharnement – life is beautiful, comme un talisman ou un mantra. Le documentaire pose de bonnes question et est dévoilé en première mondiale cette semaine, en compétition à l’IDFA.

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par Nicolas Bardot

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