A voir en ligne | Critique : Human Factors

Nina et Jan forment un couple franco-allemand. Pour échapper aux tensions croissantes dans l’agence dans l’agence publicité qu’ils co-dirigent, ils décident de partir en vacances avec leurs enfants dans leur maison en bord de mer. Le couple vient de signer avec un nouveau client, politiquement très important, ce qui les force à remettre en question leurs priorités. La retraite idyllique hors-saison tourne soudain au sinistre quand leur domicile se retrouve envahi de façon mystérieuse…

Human Factors
Allemagne, 2021
De Ronny Trocker

Durée : 1h42

Sortie : 19/06/2022 (sur Mubi)

Note :

QUI EST LA ?

« Tout est propre est bien rangé » dans la maison de Nina et Jan. Couple allemand aisé, citadin, moderne, possédant une maison de vacances sur la côte belge : ils ressemblent à un modèle de famille parfaite. Mais la table du petit déjeuner a beau avoir l’air de sortir d’un catalogue d’ameublement, enfants comme parents font semblant de ne pas remarquer que la paix de cette image d’Épinal est troublée par le métro qui passe juste sous leurs fenêtres. Le compte à rebours de l’implosion familiale est déjà lancé. Mais comme le sous-entendent les nombreux plans où les personnages sont filmés à travers d’immenses vitres, c’est semble-t-il de l’extérieur que va venir le danger.

Human Factors de Ronny Trocker (lire notre entretien) débute pourtant à l’intérieur même de la maison de vacances. Presque en caméra subjective, la caméra circule dans des pièce vides, alors qu’on entend au dehors la famille se garer dans l’allée. Cette scène traduit le point de vue… de qui ? Qui est là ? Qui est « à la maison mais » pour reprendre le titre du dernier Angela Schanelec ? C’est le premier dérèglement de cette partition familiale, drame paranoïaque où le vernis social craque comme une mini-plaque tectonique. A la suite de ce premier tremblement, tous les membres de la famille semblent à la fois sur les nerfs, et prisonniers d’une ronde de méfiance et de perte de repères.

Présenté à Sundance il y a quelques semaines et aujourd’hui à la Berlinale, Human Factors possède plus d’un élément identifiable (et précieux !) du cinéma allemand moderne : une exploration du décalage entre une personne et son rôle social, un trouble fantastique, une réinterprétation magnétique des codes et des liens sociaux…, ainsi que deux acteurs bien identifiés de l’Ecole de Berlin. A eux deux, Mark Waschke et Sabine Timoteo ont notamment joué chez Petzold, Schanelec et Glasner. Hasard de la Berlinale, on retrouve d’ailleurs Timoeto également au casting du magnifique La Jeune fille et l’araignée de Ramon et Silvan Zürcher.

La manière qu’a le film de flirter avec le home invasion évoque des échos d’Egoyan ou Haneke, mais la mise en images est ici peut-être un peu trop en sourdine pour garder en tête de si imposantes comparaisons. Pour un film sur le non-dit, Human Factors pourrait bénéficier d’encore plus de mystère (les scènes sur les amis de la fille, et le sous-texte politique de façon générale, sont sans doute un peu trop lisibles). Néanmoins la structure narrative inattendue, éclatée pour mieux refléter une multitude de point de vue, riche de variations habiles, réserve son lot de surprise et de remise en question malines.


>> Human Factors est visible sur Mubi

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par Gregory Coutaut

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