Sept récits miniatures, hypnotiques et erratiques. Inoffensifs en apparence ils deviennent de plus en plus intenses jusqu’à former un kaléidoscope psychologique.
Forest – I See You Everywhere
Hongrie, 2021
De Bence Fliegauf
Durée : 1h52
Sortie : –
Note :
DE L’AIR
Le cinéaste hongrois Bence Fliegauf est un habitué de la Berlinale. Just the Wind, drame entêtant sur une famille rom, y avait remporté le Grand prix du jury en 2012, tandis que Dealer (2004) et l’énigmatique Lily Lane (2008) furent présentés au Forum. Ce fut également cas de son tout premier long métrage, Forest, dont Forest – I See You Everywhere se veut une variation. Au fil de son œuvre séduisante et parfois inclassable, Fliegauf a su faire preuve d’une hypnotisante singularité, mais c’est peu dire que celle-ci est cette fois poussée à l’extrême. On aurait du mal à se rappeler quand on a vu pour la dernière fois un film aussi peu intéressé à l’idée d’accueillir son spectateur, de le mettre à l’aise.
Le film se découpe en plusieurs segments narratifs étanches. Des affrontements verbaux entre deux personnages à chaque fois filmés en plans tellement rapprochés qu’ils en deviennent inconfortables, à l’image du générique de début aux lettres délibérément floues. Comment juger d’une mise en scène si hermétiquement cadenassée qu’elle n’offre aucune variation ou respiration ? Fliegauf nous plonge sans ménagement dans des discussions ayant déjà commencé, nous laissant démêler les nœuds de ces étranges jeux de pouvoir. Le monologue d’ouverture prend tellement de parenthèse et de détours qu’il pourrait en devenir drôle, s’il n’était pas hélas empesé de sérieux.
Forest – I see You Everywhere travaille dans son ton quelque chose d’éprouvant, de volontairement étouffant, comme les relations ambigües dépeintes à l’écran. Pourquoi pas ? On souhaiterait pourtant ardemment que cette étrange fièvre débouche sur autre chose, se déploie, dépasse la taille du je-ne-sais-quoi d’infinitésimal entre le trop-dit et le non-dit. On ne peut même pas accorder à ce film assommant le bénéfice du jusqu’au-boutisme puisqu’il ne nous emporte justement pas bien loin. L’horizon du long métrage reste aussi implacablement restreint que le champ anxiogène (et uniformément marron) de la caméra : dans les deux cas, pas ne place pour nous.
L’Oursomètre : Forest – I see You Everywhere exige beaucoup et offre peu en retour. Difficile d’imaginer que la majorité des jurés soient friands de cette formule.
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par Gregory Coutaut