TIFF 2022 | Critique : Cop Secret

Bussi se considère comme le meilleur flic d’Islande mais il cache un secret : il est amoureux en cachette de son nouveau coéquipier.

Cop Secret
Islande, 2021
De Hannes Þór Halldórsson

Durée : 1h38

Sortie : –

Note :

POLICE ACADEMY

Cop Secret raconte l’histoire d’un superflic viril, marié et hétéro, qui se sent soudain très attiré par son nouveau coéquipier, ouvertement pansexuel. Autant dire qu’il s’agit là du pitch idéal pour un porno gay, qui n’aurait d’ailleurs même pas besoin de changer de titre. Mais Cop Secret est une comédie, où les riffs de guitare et les clins d’œil aux années 80 viennent souligner les gags et les ralentis badass. Une comédie qui vient pourtant de faire sa première parmi les films d’auteurs très sérieux du Festival de Locarno (en dépit d’une mise en scène pas super inspirée). Comme si cet improbable combinaison ne suffisait pas à faire du film un drôle de rébus, il s’agit du premier long métrage de Hannes Þór Halldórsson, qui est par ailleurs gardien de l’équipe de foot d’Islande.

Une comédie qui prend pour source de gag l’homosexualité inattendue d’un personnage ? Nos signaux sont au rouge face à cette formule ayant donné lieu à plus d’une potacherie insultante. On peut aussi se demander si un footballeur est la personne à qui nous autres spectateurs gay ferions le plus spontanément confiance pour parler d’homosexualité sans maladresse. Or Hannes Þór Halldórsson a déjà réalisé ses premiers pas derrière la caméra, et c’était en quelque sorte déjà un pas de côté vers la culture queer puisqu’il a signé le clip (relativement classique) des candidats islandais de l’Eurovision 2012.

Allons droit au but (désolé pour ce jeu de mot sportif) : Cop Secret n’est pas homophobe, est c’est un grand soulagement. Mais cette absence de défaut ne se transforme pas non plus en qualité. Si le film s’en tire, c’est avec une fourberie scandaleuse puisque contrairement à ce qu’indique le résumé officiel, l’homosexualité refoulée du héros n’est pas le nœud principal du scénario. Il ne s’agit que d’un détail traité dans une poignée de scènes, n’allant guère plus loin que de chastes bisous, avant d’être quasiment abandonné. 90% du temps, Cop Secret n’est qu’un buddy movie policier de plus, avec blagues de pissotières et coups de coude de bros entre deux braquages. On en vient à se demander si le fait que le héros s’appelle Bussi, soit cul en argot gay américain (bussy : abréviation de boy pussy) ne serait pas une blague de mauvais goût

Face à ce film décidément pas fait pour nous (et pas vraiment fait pour Locarno non plus) on se retrouve avec la frustration d’avoir mordu à l’hameçon du queer baiting pour au final se taper le film le plus hétéro qui soit, et qui se termine d’ailleurs… dans un match de foot (certes féminin). L’impression d’être le dindon de la farce d’un film qui fait uniquement semblant de nous inclure. Les codes conventionnels de la comédie masculine, ici trop sagement respectés, auraient pu servir pour faire passer un commentaire sur le masculinisme, mais Cop Secret est un film trop terne et paresseux, qui ne saisit à aucun moment l’opportunité d’offrir une idée ou une image un tant soit peu subversives – dommage.

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par Gregory Coutaut

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