Festival de Rotterdam | Critique : Ariel

Une actrice argentine débarque sur une île étrange et enchantée où tous les habitants sont devenus des personnages de Shakespeare.

Ariel
Espagne, 2025
De Lois Patiño

Durée : 1h45

Sortie : –

Note :

DE TOUTES PIÈCES

Lois Patiño représente le versant le plus original et excentrique de la passionnante nouvelle génération de cinéastes espagnols ayant émergé ces dernières années, et sa jeune filmographie ressemble déjà à un brillant jeu de l’oie arty. Si le formidable Samsara (hélas toujours sorti en France) était venu redistribuer avec ambition les cartes de son cinéma, Ariel vient au contraire en revisiter différentes cases, comme un tour du propriétaire. Après tout, on peut considérer qu’on a bien le droit de prendre le risque de se répéter quand on a son style bien à soi.

Celles et ceux qui ont eu la chance de voir à la Quinzaine des cinéastes Sycorax, le superbe court métrage que Patiño avait coréalisé avec le cinéaste argentin Matías Piñeiro en 2021, ne seront pas dépaysé.e.s à face à la nouvelle traversée maritime et shakespearienne qu’offre Ariel. Mais l’évocation poétique qui fonctionnait à merveille au sein des restrictions d’un format court s’empêtre ici dans des répétions superflues. Ariel est une actrice qui débarque soudain sur une île mystérieuse dont tous les habitants sont des personnages de Shakespeare. Or Ariel est justement venue pour jouer La Tempête (déjà la pièce la plus méta de Shakespeare, et pas la plus immédiatement digeste), et plus précisément pour interpréter un personnage nommé Ariel. Plutôt que de s’imbriquer mutuellement façon poupée russe, les différents niveaux de lecture se superposent avec raideur. Le concept prend trop le pas sur le reste pour qu’on soit authentiquement ému par cette histoires de fantômes en quête d’auteur.

En revanche on retrouve ici le talent de Patiño pour brosser des compositions saisissantes. La mer peut devenir violette et le ciel soudain rose, mais c’est encore quand il filme la nature telle quelle est que la réussite opère le plus. Quand sa caméra explore une forêt brumeuse et accueillante, le moindre fondu enchainé donne l’impression de s’enfoncer dans une chaleureuse hypnose comme dans un doux matelas de mousse végétale.

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par Gregory Coutaut

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