A voir en ligne | Critique : Aniara

Après avoir épuisé toutes les ressources de la Terre, la population humaine restante prend place dans d’immenses vaisseaux afin de rejoindre la planète Mars. Un de ces engins spatiaux s’appelle ANIARA. À son bord, les passagers sont certains de faire un agréable voyage et d’arriver à destination en trois semaines. Le vaisseau, qui ressemble à un immense centre commercial, offre tous les services nécessaires à satisfaire une société profondément consumériste. Tout semble bien se passer jusqu’à ce qu’un accident fasse dévier ANIARA de sa trajectoire…

Aniara
Suède, 2018
De Pella Kågerman et Hugo Lilja

Durée : 1h46

Sortie : actuellement en vod

Note : 

SUR LA TERRE COMME AU CIEL

« Nous sommes des experts en refoulement » : cette réplique, entendue dans Aniara, ressemble ironiquement à un autoportrait de la Suède. Et si effectivement Aniara, premier long métrage de Pella Kågerman et Hugo Lilja, est suédois, son message est au final plus universel… et parle d’une humanité entière devenue experte en refoulement. Aniara raconte l’histoire d’un voyage spatial – pas de la conquête avec des astronautes, mais un voyage avec ses passagers lambdas (sauf que ceux-ci se dirigent vers Mars). C’est ici de la pure SF dans l’espace, c’est aussi un postulat apocalyptique qui trouve un écho évident avec des problématiques bien réelles. Celles d’une humanité qui continue à vivre comme si de rien n’était.

Le film parvient à décrire efficacement ce mélange d’angoisse et de refoulement de populations qui font toujours leur shopping tandis que le monde s’écroule. « Ici, vous êtes à l’abri » prévient-on – le genre de réplique que l’on peut trouver dans un film catastrophe, accompagnée d’un clin d’œil coquin. Aniara, pourtant, sera plus psychologique que spectaculaire. Ça n’empêche pas le film d’être soigné visuellement, de ses design SF à sa lumière. Mais l’une des principales réussites du long métrage réside dans son écriture.

Aniara aurait pu dériver comme son vaisseau. Comment briser la monotonie redoutée ? Par l’écriture de vrais personnages, qu’ils soient principaux ou secondaires – essentiellement des personnages féminins et qui ne sont pas utilisés comme de complaisantes final girls pour fanboys. La qualité d’écriture se voit également par ce que le film évite – pas de surenchère gratuite pour donner l’illusion que quelque chose se passe, et une façon de rentrer net dans le sujet comme ce générique de début… assez particulier.

Le long métrage fait aussi un usage intelligent de l’ellipse. D’abord parce que celui-ci situe le film entre un certain minimalisme mais aussi une vertigineuse ambition. Ensuite parce que le scénario a suffisamment de ressource pour faire évoluer son histoire entre les différents sauts dans le temps. En témoigne ce cheminement allant de la danse à la transe jusqu’à l’occulte – ou comment l’humanité plongée dans une nuit éternelle s’accroche aux refuges spirituels pour affronter l’impossible. Cela se déroule dans les étoiles et le futur, cela raconte finement et de manière convaincante ce qui se passe ici et maintenant.


>>> Aniara est visible en vod sur UniversCiné

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par Nicolas Bardot

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