Critique : A Real Pain

Deux cousins aux caractères diamétralement opposés – David et Benji – se retrouvent à l’occasion d’un voyage en Pologne afin d’honorer la mémoire de leur grand-mère bien-aimée. Leur odyssée va prendre une tournure inattendue lorsque les vieilles tensions de ce duo improbable vont refaire surface avec, en toile de fond, l’histoire de leur famille…

A Real Pain
États-Unis, 2024
De Jesse Eisenberg

Durée : 1h30

Sortie : 26/02/2025

Note :

CE QUI NOUS LIE

Primé début 2024 au Festival de Sundance, A Real Pain est le second long métrage de Jesse Eisenberg en tant que réalisateur après When You Finish Saving the World en 2022. Acteur chez M. Night Shyamalan, Noah Baumbach, David Fincher ou Kelly Reichardt, Jesse Eisenberg s’est constitué, de film en film, une sorte de personnage cohérent malgré les univers différents de ces cinéastes. S’il n’est pas encore absolument évident de voir une personnalité de réalisateur affirmée dans la mise en images de A Real Pain, le film se distingue néanmoins par son habileté narrative qui en fait un probable crowdpleaser.

Là où When You Finish Saving the World nous avait laissés assez circonspects, A Real Pain fait preuve d’une efficacité scénaristique qui n’a pas peur des archétypes. Le long métrage se repose en effet sur les recettes classiques des comédies d’antagonistes : ici, deux cousins autrefois proches et que tout oppose aujourd’hui. Énergie nerd pour l’un (Eisenberg, comme un gant), énergie bro pour l’autre (Kieran Culkin, qui se sort avec talent d’un rôle qui pourrait être assommant), garçon effacé contre gaillard au léger syndrome du protagoniste. Le regard généreux d’Eisenberg et sa capacité à offrir plusieurs dimensions à ses protagonistes donnent du cœur à un film dont le synopsis semble pourtant sorti d’un générateur automatique de Sundance (les deux cousins devenus des étrangers entament en Pologne un voyage organisé sur l’Holocauste, en souvenir de leur grand-mère).

Une partie de l’équipe du long métrage est polonaise, notamment l’excellent directeur de la photographie Michał Dymek (qui a travaillé récemment sur EO, La Jeune femme à l’aiguille ou Pierce). La ville et ses alentours sont des lieux de mémoire et sont filmés comme tels. Autre motif classique mais utilisé avec efficacité par Jesse Eisenberg : ce n’est pas tant la destination que le voyage qui importe ici. Tous ces ingrédients bien identifiés privent probablement A Real Pain de plus de profondeur ou d’aspérité, mais ce film rondement mené sait comment se positionner émotionnellement – son mélange d’humour et de drame est assez finement opéré. A Real Pain, le titre du film, peut signifier littéralement une douleur réelle, mais peut désigner également une personne qui serait un vrai boulet. Si A Real Pain obéit à des recettes, il a aussi en lui quelque chose de vrai et d’authentique : dans un cadre mainstream, avec des angles plutôt arrondis, Jesse Eisenberg parvient à réaliser un portrait émouvant, et trouve souvent la bonne respiration.

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par Nicolas Bardot

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