Comme chaque fin d’année, Maria, Dan et Ilinca participent à un voyage humanitaire en SUV. Au long des chemins de montagne poussiéreux du village roumain d’Întregalde, ils rencontrent un vieil homme qu’ils décident d’aider. En l’accompagnant à la scierie où il dit travailler, leur voiture se retrouve coincée dans un fossé et la scierie s’avère être abandonnée. Alors qu’ils sont obligés de passer la nuit avec le vieil homme sénile, leurs idées sur l’empathie et l’altruisme sont mises à rude épreuve.
Intregalde
Roumain, 2021
De Radu Muntean
Durée : 1h44
Sortie : –
Note : 
A L’AIDE
Des jeunes gens mènent une mission humanitaire dans la Roumanie rurale. La nature est superbe, les héros bien intentionnés, mais l’histoire que raconte le Roumain Radu Muntean est bien plus retorse. La nature est luxuriante certes, mais c’est aussi une nature dans laquelle on s’embourbe, elle est verte à première vue mais c’est en fait une patinoire boueuse sur laquelle les protagonistes, sûrs d’eux mais finalement patauds, vont laborieusement glisser jusqu’à la chute.
Muntean emprunte beaucoup de codes horrifiques archétypaux sans jamais qu’Intregalde ne soit purement un film d’horreur. Il parvient, sans scène horrifique, à avoir une intéressante tension de film d’horreur. Une accumulation qui, in fine, crée une sorte de farce : doit-on être inquiet et en empathie pour ces sauveurs, ou est-ce qu’au contraire on a le droit d’en rire ? La complexité humaine dépeinte par le cinéaste passe par des moyens tout aussi nuancés – Intregalde n’est jamais entièrement ceci, ou entièrement cela, et se situe davantage dans un excitant entre-deux.
Comme dans ses précédents longs métrages, Muntean bâtit une tension paranoïaque en sourdine. Le film est toujours au bord de l’implosion et la tension se construit peu à peu. Par les dialogues d’abord, par l’absurdité sisyphéenne des situations. Lors d’une précédente interview, Radu Muntean commentait : « pour moi la tension ne doit pas nécessairement grandir et exploser à l’intérieur d’une même scène, c’est un processus qui s’étale sur tout le film ». Et c’est cette architecture-là qui fait à nouveau le succès d’Intregalde.
Le cinéaste se questionne ici sur les limites de l’empathie, sur la nature d’un altruisme qui peut être performatif. Cela pourrait prendre l’aspect d’un drame social parfaitement sérieux – et sérieux, Intregalde l’est aussi. Mais il y a une anticipation jubilatoire à ne pas savoir sur quel pied danser devant ce long métrage facétieux – s’agit-il d’un film de genre ou d’une comédie noire ? Cette aisance, cette fluidité et cette habileté sont la marque d’un conteur de talent.
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