Sélectionné à la Quinzaine des Réalisateurs et en salles le 7 décembre, Sous les figues est le premier long métrage de fiction de la documentariste Franco-Tunisienne Erige Sehiri. Dans ce film à la fois simple et radical, minimaliste et ambitieux, la cinéaste raconte une journée dans la vie d’hommes et de femmes récoltant des figues. Avec finesse et profondeur, Sehiri filme une bulle et tout un monde autour. Erige Sehiri est notre invitée.
Dans quelle mesure votre expérience de documentariste a-t-elle nourri votre première fiction ?
Comme pour le documentaire, je suis partie d’une rencontre, d’une situation ou d’une personne qui m’émeut dans la vie. Le documentaire a été mon école mais la fiction me permet plus de liberté. Dans ce film particulièrement, je suis allée cueillir par petites touches ce qui m’émeut chez ces ouvrières agricoles et les jeunes saisonniers.ères. A partir des histoires qu’elles m’ont racontées et de ce que j’ai pu observer de leur quotidien, j’ai recréé un monde qui leur est familier mais en huis-clos, comme une sorte d’expérience collective pour raconter un destin collectif.
La façon dont vous filmez les figuiers est remarquable : les personnages ont les pieds sur terre mais on a parfois le sentiment qu’ils sont en hauteur, dans les branches. Il y a quelque chose de séduisant et de bucolique, mais on a aussi l’impression par le cadre que les protagonistes sont prisonniers dans les branches. Pouvez-vous nous en dire davantage sur cet aspect du film ?
Je crois que c’est très représentatif du pays. Nous vivons dans un beau pays, avec une belle lumière, mais à l’intérieur, dans les régions rurales, les jeunes étouffent. Ils sont à la fois très attachés à leur environnement, ils ont des liens très forts les uns avec les autres que nous avons presque perdus en ville, mais il y a une sorte de d’amertume, comme si leurs rêves étaient inaccessibles.
Votre film est à la fois simple et radical. Pouvez-vous nous parler du choix de cette unité de lieu, de temps, d’action ?
J’aimais l’idée qu’un huis-clos en plein air, en l’espace d’une journée, puisse raconter autant de choses sur l’amour, l’amitié, le travail, l’argent, le rapport à la terre, la vie. Je voulais utiliser un décor naturel et le transformer en scène de théâtre où je pouvais donner l’occasion à des femmes et des hommes de jouer un rôle, mais surtout de s’exprimer sans artifice.
Quels sont vos cinéastes de prédilection et/ou qui vous inspirent ?
Cela dépend vraiment des périodes. Il m’arrive de ne pas regarder de film du tout et de me consacrer à la recherche surtout lorsque je prépare un film.
Quelle est la dernière fois où vous avez eu le sentiment de voir quelque chose de neuf, de découvrir un nouveau talent ?
Pendant le casting de mon film !
Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 16 mai 2022. Un grand merci à Claire Viroulaud. Crédit portrait : Elise Ortiou-Campion.
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