Dévoilé en première mondiale au Festival de Rotterdam et sélectionné au Festival d’Annecy, Flower Show est un court métrage d’animation au trait vibrant. Cette fable sur la féminité se déroule dans un décor fleuri à la fois bucolique et étouffant, où la menace semble tapie quelque part, parmi d’adorables couleurs. Ce film surprenant, réalisé par la Finlandaise Elli Vuorinen, est visible en ligne jusqu’au 16 septembre sur la plateforme de France Tv.
Quel a été le point de départ de Flower Show ?
J’habite à la campagne à la ferme de Böhle, où se trouve également notre maison de production, Böhle Studios. J’ai commencé à jardiner et à réfléchir au jardinage en tant que concept. Et en tant que mère, je trouve qu’il est facile de voir le lien entre le jardinage et l’éducation des enfants. En même temps, je vois les jardins comme un symbole de statut social et comme un moyen de laisser une trace dans le monde ou dans la nature. Cela a été le point de départ de tout le film.
L’animation dessinée à la main donne une vibration particulière à votre film. Pouvez-vous nous en dire plus sur la technique d’animation que vous avez choisie pour raconter cette histoire en particulier ?
En ces temps instables et incertains, les gens ont tendance à chercher du réconfort dans la nostalgie. Je trouve cela quelque peu problématique. Les vieilles structures des sociétés, les jardins et l’éducation des enfants ont besoin d’une compréhension plus holistique de la nature et du comportement humains. Avec ce film, je veux remettre en question la façon dont nous voyons la nature, dont nous ressentons de la nostalgie et admirons la jeunesse. Cette animation à la main évoque le sentiment inconfortable que les choses ne sont pas aussi roses qu’elles peuvent le paraître.
Comment avez-vous trouvé l’équilibre entre l’humour et la violence dans Flower Show ?
Des jump cuts dans la forêt sauvage sont insérés au cœur du flux fragmenté du récit. Le but de cette narration brisée est d’encourager le spectateur à former ses propres images mentales et sa propre chaîne d’événements. L’atmosphère, où la formalité courtoise, la sexualité allusive et la nature mystérieuse s’entremêlent, est prépondérante. Il y a aussi beaucoup de ce que j’appellerais des images de comparaison dans le film. Par exemple, la ficelle du bouquet de fleurs, les rênes des chevaux, les rubans du corset et les bandeaux sur les yeux – tout est lié. Sur le plan symbolique, le développement sexuel de la jeune fille est juxtaposé à la croissance de la fleur, la masculinité des chasseurs au désir, et les rênes des chevaux à l’obéissance.
Les fleurs et les plantes colorées ainsi que leur animation traditionnelle jouent un rôle clé en ce qui concerne l’atmosphère du film. La floriographie – le langage des fleurs – est également incorporée dans les images pour renforcer la profondeur symbolique du film. Mais malgré les nuances plus sombres du court métrage, je veux aussi célébrer la beauté de la nature et sa régénération. L’humour a toujours été une partie essentielle de mon processus d’écriture de scénario et pour moi, il n’est pas possible de raconter une histoire – aussi sombre soit-elle – sans humour.
Qui sont vos cinéastes de prédilection et/ou qui vous inspirent ?
Maya Deren, Priit Pärn, Roy Andersson… me viennent à l’esprit en premier. De nos jours, il est devenu plus commun que je sois inspirée par des artistes d’autres disciplines artistiques.
Quelle est la dernière fois où vous avez eu le sentiment de voir quelque chose de neuf, de découvrir un nouveau talent ?
Je travaille en tant que maître de conférences en animation à l’Académie des arts de Turku. Là, jour après jour, je découvre de nouveaux talents. Je suis aussi maman d’un enfant de 2 ans, donc je n’ai pas eu beaucoup de temps pour aller au cinéma ces derniers temps, mais les expositions et autres événements culturels sont quelque chose que j’apprécie chaque semaine avec ma fille. J’aime me laisser surprendre par l’art, quel qu’il soit et où qu’il soit. Les festivals de cinéma sont un excellent moyen d’y parvenir. Au Festival de Rotterdam, j’ai vraiment hâte de me plonger dans les projections de films sans savoir ce que je vais découvrir.
Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 19 janvier 2024. Un grand merci à Luce Grosjean.
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