Découvert Festival de Locarno, le réalisateur brésilien André Novais Oliveira a fait un très brillant parcours en festivals avec son second long métrage, Temporada. Ce beau film sort enfin en France ce 20 novembre. Il fait le récit attachant, rempli de couleurs et de lumière, d’une femme qui entame une nouvelle vie. Rencontre avec son réalisateur…
Quel est le point de départ de Temporada ?
L’idée originale m’est venue de ma propre expérience, lorsque j’ai effectué exactement le même travail que le personnage principal. C’était il y a dix ans et ça a duré six mois. Travailler comme agent de contrôle des endémies m’a aidé à mieux comprendre la réalité du voisinage dans lequel j’ai grandi, celui qu’on voit dans le film. Cela a modifié mon regard sur cet endroit et sur les gens ; j’ai pris conscience de la richesse de cet environnement, rempli d’histoires et d’expériences diverses. C’est ce qui m’a motivé à faire ce film, ainsi que la possibilité de collaborer avec quelques uns des employés que j’ai rencontrés à l’époque (certains d’entre eux jouent une version d’eux-mêmes dans le film).
Temporada est rempli de couleurs et de lumière, mais traite de sujets graves. Comment avez-vous travaillé sur le style visuel avec votre directrice de la photographie pour raconter cette histoire en particulier ?
Une part très importante de mon intérêt pour ce projet était de dépeindre ce quartier avec ses propres couleurs caractéristiques. Ce sont des lieux lumineux, colorés, avec quelques couleurs fortes selon l’endroit où votre regard se pose. Avec les rayons du soleil, tout devient plus intense, plus beau, et j’ai pensé qu’il était intéressant de souligner la beauté d’un lieu qui n’est pas traditionnellement considéré comme beau. Du coup depuis le tout début du projet, l’idée de faire ce portrait très vif constituait un guide pour moi-même et ma directrice de la photographie, Wilssa Esser. Nous pensions tous les deux que le film devait avoir cette aura, même s’il traite des sujets graves que vous mentionnez. Mais Temporada parle aussi de thèmes ordinaires comme l’amitié ou affronter l’adversité, par conséquent on a pensé que ce climat particulier devait être le principal chemin à suivre pour l’esthétique du film.
A l’ère de Bolsonaro, dans quelle mesure diriez-vous qu’un film comme Temporada a désormais un sens différent ?
Quand j’ai vu les réactions des gens qui ont vu le film, j’ai compris qu’il prenait un certain relief en ces temps difficiles. D’une certaine manière, Juliana, le personnage principal, conserve une force de vie qui lui permet de trouver sa place, de trouver son identité, et les spectateurs peuvent s’y identifier. Particulièrement maintenant, alors que le futur est si incertain pour la plupart des gens.
Pouvez-vous nous en dire plus sur le choix de ce titre ?
Le titre fait directement référence à la période de temps vécue par Juliana. Avant la première scène où elle fait son apparition, je pense qu’elle en était à une étape différente de sa vie. Le film débute, elle apparaît et de ce moment jusqu’à la fin, elle va vivre l’instant, avec un passage du temps qui va la transformer intérieurement et radicalement. Même si cela peut paraître très subtil vu de l’extérieur. C’est le temps vécu qui l’aide à changer. Le titre, pour moi, est à propos du temps.
Quels sont vos cinéastes préférés, ceux qui vous inspirent ?
J’ai beaucoup de cinéastes favoris. Je regarde des films brésiliens de différentes époques, et cela m’inspire beaucoup. Mes amis et partenaires de la société cinématographique Filmes de Plástico constituent également une grande source d’inspiration pour moi. Pour moi, c’est un exercice constant que d’être à l’écoute de la production brésilienne, qu’elle soit du passé ou du présent. En ce qui concerne Temporada, j’ai été plus directement inspiré par le réalisateur brésilien Carlos Alberto Prates Correia, mais aussi par des réalisateurs étrangers tels que John Cassavetes, Charles Burnett, Kelly Reichardt, Corneliu Porumbuiu et Abbas Kiarostami.
Quel est le dernier film où vous avez eu le sentiment de voir quelque chose de neuf ou de découvrir un nouveau talent ?
A vrai dire je crois que ça m’est arrivé en écoutant Tyler the Creator.
Entretien réalisé par Nicolas Bardot le 20 novembre 2018. Un grand merci à Sandro Fiorin et Thiago Macêdo Correia.
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